dimanche 22 janvier 2023

Protection Rapprochée (Assassination, 1h28, 1987) de Peter R. Hunt

Avec Charles Bronson, Jill Ireland, Stephen Elliott, Jan Gan Boyd, Randy Brooks, James Lemp, Michael Ansara, James Staley.

Charles Bronson nous donne ici presque une interprétation légère. Il est le garde du corps en chef de la femme du président des USA. Bien sûr elle le déteste. Et bien sûr des individus essaient de l'assassiner à plusieurs reprises. Sans dévoiler l'évolution de l'histoire, nous pouvons dire que nous sommes dans le convenu et rien ne surprend. Même l'identité du méchant en chef, que le typecasting désigne dès sa première apparition.

Les séquences d'action, qui arrivent à intervalles réguliers, sont du niveau un téléfilm des années 70, anémiées, peu spectaculaires, paresseuses et pauvres. Il y a un manque de moyens patent et ces séquences d'action ressemblent à du bricolage (à l'époque le CGI porn n'était pas généralisé) sans grande réussite. Mais heureusement, le film n'est pas là, mais dans le jeu de Charles Bronson, qui hormis son personnage de flic usuel possède ici une dimension romantique avec deux courtisanes. La première, sa collègue, Jan Gan Boyd, est ostentatoire, même si cette relation peu crédible, mais reste plausible, ce qui finalement procure un peu de densité à l'ensemble. La seconde, avec la présidente, interprétée par Jill Ireland (dont la dimension de femme de Charles Bronson à la ville est impossible à ignorer), qui évoluera au cours de l'histoire. Charles Bronson arrive à avoir de multiples expressions faciales.

 Protection rapprochée [Blu-Ray] [Blu-ray]

Un Fauteuil Pour Deux (Trading Places, 1h56, 1983) de John Landis

Avec Dan Aykroyd, Eddie Murphy, Jamie Lee Curtis, Denholm Elliott, Ralph Bellamy, Don Ameche.

Le style neutre et sans ostentation de John Landis est parfait pour cette histoire où le capitalisme le plus inhumain est pointé du doigt. Capitalisme incarné par le duo Ralph Bellamy et Don Ameche, deux frères ne pensant qu'en termes de dollars. Le seul personnage humain est celui de Jamie Lee Curtis. Même Denholm Elliott, le majordome chez ces gens riches, navigue en permanence dans l'ironie.

Tous les personnages sont dans le paraître, le déguisement, souvent faut, même Jamie Lee Curtis. Y compris les personnages dans la séquence du train, où ils sont déguisés, d'abord eux quatre, mais aussi les autres voyageurs. Un film sur le changement d'apparences donc. Et tous les personnages adhèrent à la nécessité de faire fructifier l'argent.

La bascule du film vers ces séquences finales est d'ailleurs la grande réussite du film: le film bascule dans une autre forme de farce, plus graphique, plus énorme, qui sort le film de la mécanique bien huilée et un peu mièvre, pour donner du piquant au film.  Qui commence avec Dan Aykroyd en noir rasta, Eddie Murphy en Africain ou Jamie Lee Curtis en Tyrolienne qu'elle pense suédoise. Très bonnes scènes finales pour terminer le film qui devenait un peu mièvre et surtout long, qui bascule dans le presque grotesque (le vrai gorille et le faut gorille). Cette catharsis finale en fait bien un film de John Landis (il n'a pas écrit le scénario) où le loufoque croise la surenchère ou l'absurde. À ce titre d'ailleurs, la séquence des vendeurs et acheteurs du jus d'orange est bien dans la lignée de la séquence du train qui a précédé: délirante, folle et loufoque.

Un Fauteuil pour Deux [Blu-Ray]





La Nuée (1h41, 2020) de Just Philippot

Avec Suliane Brahim, Sofian Khammes, Marie Narbonne, Raphael Romand, Stéphan Castang, Victor Bonnel, Christian Bouillette, Renan Prévot, Vincent Deniard.

Just Philippot réussit un film au climat à la limite du fantastique avec une thématique du film qui est proche de la science-fiction. Suliane Brahim élève des sauterelles, pour gagner sa vie (utilisées pour des farines protéinées, qui vont nourrir des animaux), et pour élever ses enfants. Cela devient une obsession maladive et elle va tout faire pour que cela fonctionne, jusqu'à donner de sa personne. Le film bénéficie d'un climat, largement porté par la bande-son, avec en permanence le bruit des nuées de sauterelles de l'élevage, qui bien sûr contribue au climat oppressant permanent. Ces bruits permanents évoquent aussi au spectateur un climat de fin du monde par atavisme, car vu mainte fois dans d'autres films, et craint, car la ligne dramatique est imprévisible et de petites bifurcations (le voisin, la chèvre, l'ami vigneron) font que régulièrement des sous-intrigues donnent une impression d'un relâchement de la pression. Mais le personnage de Suliane Brahim est têtu, obsédé, et recadre le drame sur elle et ses sauterelles et fonce avec obstination dans l'élevage de ses sauterelles.

Le film commence de manière naturaliste, agricole, puis bascule petit à petit dans la folie et l'horreur. Suliane Brahilm semblant ne plus donner prise à des éléments de réalité. La présence de ses enfants, de ses animaux sont bien exploités et permettent de renforcer le climat. Une très belle réussite donc.

 COMBO NUEE (LA) - CO

Barbaque (1h27, 2021) de Fabrice Eboué

Avec Marina Foïs, Fabrice Eboué, Jean-François Cayrey, Lisa Do Couto Texeira, Virginie Hocq, Victor Meutelet, Stéphane Soo Mongo, Nicolas Lumbreras, Alexia Chardard, Franck Migeon.

Belle réussite que cette comédie d'humour noir qui nous conte la révélation d'un couple de bouchers, sur le bord de la rupture, mais qui voit son couple sauvé lorsqu'il est confronté à une nouvelle viande, qu'il va servir à ses clients qui l'adorent. Fabrice Eboué ose beaucoup dans ce film politiquement incorrect où les croyances culinaires sont confrontées à d'autres croyances. Le film est riche pour montrer par petites touches le terrorisme, le sectarisme, les croyances, le racisme, sous différentes formes, et toujours de manière irrespectueuse. Cela fait du bien de voir qu'il est possible de secouer le prêt à penser politiquement correct. Le film se moque aussi de la fascination que provoquent les tueurs en série.

Fabrice Eboué se montre à la fois excellent acteur et excellent directeur d'acteur. Et finalement, par son traitement des différents personnages, arrive à rendre sympathique ce couple. Ainsi que le personnage du policier qui enquête, tout en mangeant en permanence! Ce n'est pas subtil, mais le sujet n'appelle pas la subtilité. Et c'est drôlement horrible, amusant et jubilatoire, et horrible au sens gore du terme, même si Fabrice Eboué évite les effusions de sang et se situe plus dans la suggestion (ce qui ne nuit pas du tout au film, au contraire). Un film qui fait du bien pour son côté direct et son jusqu'au-boutisme. Car Fabrice Eboué va au bout de son sujet et au bout de ses personnages. 

Le film contient ses moments d'anthologie, dont le montage-séquence du reportage animalier, par exemple, ou la première rencontre lors d'un repas du petit ami de la fille du couple.

 Barbaque

samedi 21 janvier 2023

Ek Villain : Le Retour (Ek Villain Returns, 2h09, 2022) de Mohit Suri

Avec John Abraham, Disha Patani, Arjun Kapoor, Tara Sutaria, J.D. Chakravarthi, Shaad Randhawa, Digvijay Rohidas, Bharat Dabholkar, Elena Roxana, Maria Fernandes, Riteish Deshmukh, Shivani Tuli, Neha Shitole.

Ce produit Bollywood réunit de beaux spécimens: Disha Patani et Tara Sutaria pour les filles. Et John Abraham et Arjun Kapoor pour les bovins, c'est-à-dire les tas de muscles et de mâchoires serrées. Les deux acteurs mâles sont doués pour être inexpressifs, ou exprimer l'amour béat, selon les scènes. Les deux actrices possèdent des rôles clés dans l'intrigue, tout en étant dénuées de subtilités elles aussi, mais leurs plastiques délicieuses passent très bien à la caméra.

Pour une intrigue extrêmement complexe (pour ne pas dire compliquée) qui mêle des moments de comédie romantique, d'horreur dans l'esprit slasher (ici au marteau avec un montage au rouleau compresseur), de l'action (beaucoup de combats à mains nues, de la poursuite aussi) et du suspense, car il y est question d'un tueur en série, ou de plusieurs, de deux histoires d'amour, avec en arrière-plan la police ou les familles de nos garçons et tas de muscles. C'est une espèce de macédoine qui enchaîne les petites séquences de tonalité très différentes. Qui provoque une confusion certaine dans un premier temps, puis les choses commencent à se clarifier dans le dernier tiers. Mais cette confusion est parfaite pour maintenir l'intérêt.

Le film est dénué de subtilité et de légèreté tout en étant des histoires d'amour, l'ensemble était traité au rouleau compresseur.

Les passages musicaux (des chansons d'amour ridicules, alors que peu de temps avant nous avons le tueur qui frappe ses victimes au marteau) ne sont même pas chorégraphiés (le film a-t-il manqué de moyen, ou la tension du sujet a-t-elle était jugée peu compatible avec des chorégraphies).

Ek Villain : Le retour

Les Lignes Courbes De Dieu (Los Renglones Torcidos De Dios, 2h34, 2022) de Oriol Paulo

Avec Bárbara Lennie, Eduard Fernández, Loreto Mauleón, Javier Beltrán, Pablo Derqui, Samuel Soler, Federico Aguado, Adelfa Calvo, Antonio Buíl, Dafnis Balduz.

Oriol Paulo dispose de moyens importants pour son film d’hôpital psychiatrique. Avec un beau travail sur les décors, costumes et, très important, le décor impressionnant de l'hôpital psychiatrique où se déroule une bonne partie du film. Le film est somptueux.

Un film où l'intrigue est de savoir si Barbara Lennie, patient de l'hôpital psychiatrique, est bien à sa place, ou pas, c'est à dire est-elle atteinte d'une maladie mentale ou pas. Selon les points de vue, selon le montage du film, selon les retours en arrière ou les retours en avant, la réponse diffère. Et c'est tout le propos d'Oriol Paulo de réussir un film qui tient en haleine le spectateur jusqu'au bout, jusqu'au dernier plan. Les multiples sous-intrigues que convient le scénario demandent un travail important au spectateur pour recoller les morceaux et faire les liens, et ceci en permanence. Ce qui fait que le film ne parait pas long malgré ses 2h30 de durée.

Le film est aussi plastiquement une réussite: au niveau de la photographie, des décors et des costumes. Avec une mention spéciale à Barbara Lennie, qui est de tous les plans du film, avec un gros travail pour porter toutes les composantes de son personnage.

Bande-annonce Les Lignes courbes de Dieu

Les Cobayes (1h20, 2020) de Emmanuel Poulain-Arnaud

Avec Thomas Ngijol, Judith Chemla, Dominique Valadié, Joséphine Draï, Stéphan Wojtowicz.

Une comédie sur l'usure du couple, pourtant ici assez jeune, avec pour prétexte le test d'un médicament qui guérit les couples et les fait se renouer (respect, confiance, attirance). La distribution est judicieuse et confronte des flegmes très différents entre Thomas Ngijol et Judith Chemla, tous deux parfaits. La qualité du film est d'arriver à faire un film juste, c'est-à-dire tout à la fois relatif à une certaine vérité et qui évite, pas nécessairement de justesse, les pièges qu'un tel sujet aurait pu produire dans une veine primaire et vulgaire. L'auteur en profite pour mettre quelques piques au personnel médical, ici représenté sans empathie pour ses cobayes.

Simple sans simplisme, efficace sans lourdeur, juste sans pathos, ce long métrage est une réussite dans son genre. Il est possible de faire un film sur le couple sans tomber dans le film choral qui convie irrémédiablement ses lourdeurs. Ici, pas de lourdeur, mais une légèreté certaine tout en restant sérieux, mais avec de l'humour. Vivement la suite.

Bande-annonce Les Cobayes

White Noise (2h16, 2022) de Noah Baumbach

Avec Adam Driver, Greta Gerwig, Don Cheadle, Raffey Cassidy, Sam Nivola, 

Il s'agit d'un film ambitieux, voire prétentieux, riche de thématiques injectées dans des mécaniques de comédie, de drame, de film d'horreur ou de suspenses (pour ces deux derniers toutes les séquences consécutives à l'accident chimique, ainsi que les séquences très bizarres dans l’hôpital à la fin). Le film est donc riche de climats. Noah Baumbach confirme son  talent pour écrire des films denses aux thèmes  et facettes multiples. Même si le film, à travers son générique de fin, résume le message qu'il cherche à faire passer: la peur de la mort et la consommation pour l'oublier. Tout cela pour ça aimerions nous dire. Mais le film, n'annonçant jamais la couleur et restant imprévisible en permanence, contient donc une forte hystérésis.

Les thématiques et éléments de subtilités, de richesses, qui innervent le film sont multiple et variés : la vie de famille recomposée, le stress de l'incident chimique (qui fait basculer le film dans une option un peu fantastique et film d'horreur), la relation d'Adam Driver avec sa femme, le marchand de pilules, l'épisode de l’hôpital à la fin avec les infirmières, puis le générique de fin déjà évoqué qui confirme le message principal du film. Car c'est un film à message, c'est à dire politique. Qu'il est possible de trouver tortueux pour arriver à son message. Mais c'est grâce à tout ce qui vient de précéder que le générique de fin prend son sens, en tout cas c'est ce que pense Noah Baumbach.

Adam Driver est en suspension, à la fois sur sa manière de gérer sa famille, son comportement lors de l'accident chimique, sa quête du médicament que prend sa femme. Greta Gerwig (très mal coiffée) possède son MacGuffin qui une fois connue permettra d'entrer l'intrigue dans les séquences de conclusion.

En ressort un sentiment mitigé. Nous percevons l'ambition, avec une combinaison habile de comédie, de drame et de suspense, d'abord primaire puis psychologique. Mais un sentiment de décousu domine. Mais l'exercice est ambitieux.

Bande-annonce White Noise

Entrapped (2021, 6 épisodes de 45 min) de Baltasar Kormakur

Avec Ólafur Darri Ólafsson, Ilmur Kristjánsdóttir, Björn Hlynur Haraldsson, Thomas Bo Larsen, Haraldur Stefansson, Maria Thelma Smáradóttir, Þorsteinn Gunnarsson.

Cette série policière islandaise marque l'esprit grâce à différentes composantes. La première composante est l'arrière-plan géographique de l'Islande avec ses décors, ses paysages, ses déserts, ses rythmes et les déplacements en voiture ou moto ou en hélicoptère. L'autre composante est son équipe policière constituée d'un trio avec un inspecteur mis à pied, une policière et un enquêteur: ce ne sont pas de super-flics. Ils ne bénéficient pas d'un arsenal technologique pour mener leurs enquêtes; et au cours des différents épisodes, des éléments sur leur vie personnelle sont donnés, et de plus ils font des erreurs. Et la dernière est l'intrigue, un meurtre, une multitude de parties prenantes qui pourraient avoir commis le meurtre, et nous apprendrons le nom du ou de la coupable à la fin du dernier épisode, en ayant suspecté beaucoup de personnages rencontrés au cours de la progression dramatique.

Tout cela est bien rôdé et donne un rythme plutôt lent, mais qui convient bien aux mouvements toujours inertiels sur l’île. Et les différentes parties prenantes de cette histoire permettent de varier les ingénieries sociales : une secte d'illuminés, des bikers, des familles en deuil, un meurtre antérieur non élucidé peut-être lié, l'équipe de policiers. Tout cela donne un ensemble qui possède son propre rythme et sa propre esthétique.

Une série qui répond à son cahier des charges: maintenir le spectateur captif jusqu'à la dernière minute de son dernier épisode.

Entrapped (2022) en Streaming VF HD - Seriepourvous