samedi 11 mai 2024

RRR (3h07, 2022) de S.S. Rajamouli

Avec N.T. Rama Rao Jr., Ram Charan, Ajay Devgn, Alia Bhatt, Olivia Morris, Shriya Saran, Ray Stevenson, Alison Doody, Samuthirakani, Chandra Sekhar, Makrand Deshpande, Rajeev Kanakala, Rahul Ramakrishna,  Edward Sonnenblick, Varun Buddhadev.

L'esthétique des films de Tollywood (et de beaucoup d'autres cinématographies d'Inde) fonctionne à plein régime ici : acteurs et actrices surjouant en permanence, aucune prise de son réelle et le son est retravaillé de manière irréaliste en studio (les voix sont ridicules), les méchants sont très méchants (et anglais, les méchants en fond des tonnes pour montrer qu'ils sont méchants), les gentils sont très gentils, utilisation du ralenti dans les séquences d'action, doublage pas synchronisé pendant les passages chantés (qui sont distrayants), de grands moments de ridicules (le concours de danse, ou le montage séquence avec chanson sur l'amitié entre les deux personnages principaux), des dialogues ultras redondants et très insistants, une incapacité à raconter une histoire par la mise en scène, l'utilisation à outrance du CGI porn sans souci de réalisme (c'est par moment une esthétique de dessin animé : la séquence du tigre, ou les séries d'explosion à la fin). Autre éléments qui abstrait le film de tout réalisme, sont les capacités physiques de nos deux personnages principaux, qui sont invraisemblables et dignes d'un superhéros, ou plutôt qui est celle de personnage super héroïque qui n'ont peur de rien. 

Ram Charan dans le rôle de Raju, qui a une quête secrète, que nous comprenons petit à petit et surtout tard dans le film. C'est un rôle charismatique.

N.T. Rama Rao Jr. dans le rôle de Bheem, dont la quête est claire dès le début du film. Il recherche et doit ramener la petite fille que les Anglais ont enlevée de son village.

Comme d'habitude les personnages féminins sont la portion congrue. Ici nous avons Alia Bhatt, faire valoir de son mari.  Et Olivia Morris, qui interprète le seul personnage anglais qui ne soit pas excessivement caricatural. 

Mais le film contient des séquences formidables, comme celle de la capture du tigre, ou comme la séquence du pont et du train qui s'enflamme.

Bande-annonce RRR

mardi 7 mai 2024

La Disparue (Last Seen Alive, 1h35, 2022) de Brian Goodman

Avec Gerard Butler, Jaimie Alexander, Russell Hornsby, Ethan Embry, Michael Irby, Cindy Hogan, Bruce Altman, Jordan Salloum, Dani Deetté, Chip Lane, Brian Scannell, David Kallaway.

Bonne série B sur un canevas commun. Gerard Butler ramène sa femme chez ses parents. Ils sont sur le point de se séparer. Ils font une pause à une station d'essence. Elle disparait. Personne n'a rien remarqué. La police ne le croit pas, voire le suspecte. Il la recherche. Mais il se retrouve en fuite pour pouvoir chercher lui même sa femme. Cela a déjà été fait maintes fois. Ici nous sommes dans une bonne série B, simple où le suspense et notre héros a le mérite de nous montrer du paysage et une communauté de hors la loi, c'est à dire de gens qui vivent hors système. Gerard Butler excelle dans ce genre de personnage, opiniatre, résilient, pas tout blanc, mais qui est persévérant. Le charisme de l'acteur fait le reste et le spectateur, très empathique avec lui, suit cela avec concentration. Le film est sur les turpitudes de notre personnage principal, et pas sur l'empilement de séquences d'actions, poursuites ou fusillades. Du bon travail de série à la gloire du talent de Gerard Butler.

Bande-annonce Last Seen Alive

mardi 23 avril 2024

DogMan (2023, 1h55) de Luc Besson

Avec Caleb Landry Jones, Jojo T. Gibbs,  Christopher Denham, Clemens Schick, John Charles Aguilar, Grace Palma, Iris Bry, Marisa Berenson,  Lincoln Powell, Alexander Settineri, Michael Garza.

Même si la dramaturgie pachydermique est toujours là, Luc Besson introduit de la subtilité dans son cinéma. Et il écrit de beaux dialogues pour les deux personnages principaux, Caleb Landry Jones et Jojo T. Gibbs, soit le DogMan du titre et la psychiatre qui l’interroge au poste de police, pour des scènes de dialogues entre ces deux personnages, qui sont très réussis. La richesse est dans ces belles scènes au poste de police entre ces deux personnages. Le film est une succession de flashbacks où le Caleb Landry Jones raconte son histoire à la psychiatre. À noter aussi que les dialogues de la psychiatre avec sa mère : très belle performance de Jojo T. Gibbs dans le rôle de la psychiatre. Très beau travail d'écriture.

Le film recèle de moments d'émotions où les deux personnages principaux sont émouvants chacun à leur tour. Le scénario évite certains clichés (la tension de la psychiatre avec son ex aurait peu amener le DogMan à s'occuper de l'ex, mais cela n'a pas lieu). Tout comme la fin, qui fait basculer dans un certain irréel le film.

Le film est une bonne surprise. La richesse de ces deux personnages principaux, l'idée d'employer les chiens, la performance de Caleb Landry Jones, tout cela repose sur un classicisme sur la forme ; il n'y a pas d'hystérie sur la forme. Juste une histoire de sa vie racontée par Caleb Landry Jones. Son enfance (passage assez peu subtil, mais il est difficile d'être léger), les livres et Shakespeare, le cabaret, etc.

Un film posé, réfléchi. 

Bande-annonce Dogman



lundi 1 avril 2024

The Restaurant saison 1 (2017, 10 épisodes) & 2 (2018, 10 épisodes) de Ulf Kvensler, Malin Nevander, Johan Rosalind

Metteurs en scène : Molly Hartleb, Andrea Östlund, Anna Zackrisson, Harald Hamrell.

Chaque épisode dure de l'ordre de 60 minutes. Ce qui fait un corpus volumineux.

Le film choral est parfaitement supporté par le format de la série télédiffusée, ici sous la forme de dix épisodes de cinquante à soixante minutes chacun. La vie dramatique d'une famille, la mère, les deux fils, et la fille, gravitant autour du restaurant familial, l'équipe de la salle, l'équipe de la cuisine, l'approvisionnement, la concurrence, les familles de chacun, et le temps qui passe (des années quarante aux années cinquante).

Les scénaristes gèrent parfaitement les drames, et l'enjeu pour le spectateur est de deviner quel sera l'évènement dramatique qui perturbera le bonheur de chacun des personnages. C'est principe de dramaturgie, dès que tout va bien, il faut que cela aille mal. Que va-t-il se passer ? Qui va trahir ? Qui va mourir ? Sur la durée, cela devient un peu ennuyeux.

Le contexte historique est la Seconde Guerre mondiale et l'immédiat après-guerre, à Stockholm, pour évoquer des thématiques multiples : l'adultère, le racisme, les camps de concentration, le rationnement, le syndicalisme, l'homosexualité (féminine et masculine), la famille, le capitalisme, la corruption, le féminisme, le fonctionnement d'une cuisine ou de la salle d'un grand restaurant, entre autres. Un multitude de sujets donc.

L'ensemble est parfaitement exécuté par des acteurs et des personnages que nous souhaitons suivre, malgré l'utilisation systématique du montage en parallèle et la survenue de drames régulièrement (nous savons que le bonheur ne durera pas).

Beau travail.

The Restaurant

Voyage en Italie (1h31, 2023) de Sophie Letourneur

Avec Philippe Katerine, Sophie Letourneur.

La vie courante d'un couple qui parle en voyage en Italie, avec ses problématiques de visite et d'hébergement de vie commune. Sophie Letourneur, la réalisatrice et le personnage féminin principal, compose et créé une chronique douce amère en racontant les petits moments de ce père et de cette mère entre parenthèses : les enfants sont toujours hors champ, dans l'appartement à la maison, au téléphone lorsqu'ils sont en vacances. C'est un film sans enfant, c'est à dire sur le couple.

Film est très intéressant car il montre qu'il est possible de raconter une histoire simple, avec de multiples petits enjeux dramatiques et avec un certain réalisme, et ainsi construire quelque chose de solide et une narration sur la durée, sans être révolutionnaire, mais avec une certaine passion pour savoir comment cette histoire va évoluer entre ces deux personnages
C'est une film naturel, ou naturaliste, peu importe, sur la vie d'un couple, en vacances ici, en Italie. Le choix de ce qu'il y a à visiter, le moyen de locomotion, la capacité à faire ou pas une balade avec les challenges qu'il et elle se lancent entre eux. Par exemple. Cela ne parait pas palpitant, mais cela fonctionne, le duo d'acteur emporte le film.
 
Bande-annonce Voyages en Italie

Oppenheimer (3h, 2023) de Christopher Nolan

Avec Cillian Murphy, Emily Blunt, Robert Downey Jr., Alden Ehrenreich, Scott Grimes, Jason Clarke, Kurt Koehler, Tony Goldwyn, John Gowans, Macon Blair, James D'Arcy, Kenneth Branagh, Harry Groener, Gregory Jbara.

Christopher Nolan continue de faire des films où les personnages ne suscitent aucune empathie. La forme est travaillée, avec se montage hystérique qui hache plusieurs scènes à différentes période de la vie de Cillian Murphy (qui interprère le personnage dont le patronyme donne le titre du film) dans un mode staccato : le film est quasiment un montage séquence permanent.

Nous avons l'impression qu'il a été conçu pour ne pas être visionnable sur ordiphone. Ce qui en soit est très louable. Et nous avons aussi le sentiment que ce film de 3h n'est finalement que la version cinéma d'une série télé de dix épisodes d'une heure, par exemple. Ce format serait plus adéquat pour raconter une telle histoire.

Le film couvre une petite partie de l'histoire étatsunienne, où cohabitent communistes, nazis, étatsuniens, européen. Le film semblent vouloir dénoncer beaucoup de choses mais n'arrive à être crédible sur aucune  : la création de la bombe atomique, son utilisation pour l'attaque, son utilisation pour la dissuasion (les passages où les personnages discutent ces aspects là sont les plus intéressants), la persécution des communistes, l'hystérie du maccarthysme, la corruption des politiques.

Le film indique que c'est un projet et un collectif de savants qui a créé la bombe, et pas Oppenheimer, connu comme le père de la bombe atomique. Ce qui est louable.

Le personange de sa femme, interprété par Emily Blunt, est inexistant et n'apporte rien. 

Oppenheimer

vendredi 22 mars 2024

Ricky Stanicky (1h53, 2024) de Peter Farrelly

Avec Zac Efron, John Cena, Andrew Santino, Jermaine Fowler, Lex Scott Davis, Anja Savcic, Jeff Ross, William H. Macy.

Après son incartade vers le film à Oscar, Green Book (2018), Peter Farrelly revient à son naturel, c'est à dire un humour où se mêlent scatologie et obsession sexuelle, mais aussi des éléments de poésie, avec une forme bien écrite et interprétée par une distribution réussie. Ses chefs-d'œuvre sont Marie A Tout Prix (1998), Me, Myself And Irene (2000) ou Dumb And Dumber (1994). Ceci pour rappeler les sommets, qui ne peuvent sûrement plus être atteints. Ici nous retrouvons des bribes d'impertinences. Nous avons ici en tête John Cena, qui se révèle un performer relativement caméléon oscillant ici entre le grotesque et l'émouvant, comme l'est le film. Et nous avons aussi Zac Efron et William H. Macy.

Il s'agit en quelque sorte d'un conte, où John Cena trouvera sa princesse et sa place dans un monde des affaires. Il est l'alibi imaginaire pour des sorties de trois copains. Bien sûr l'entourage demande  à voir cet ami. Les trois copains engagent un acteur amateur, John Cena, pour interpréter cet ami. C'est un registre de comédie et d'outrage. John Cena y excelle. William H. Macy fait aussi un beau travail dans un personnage pathétique.

Nous ne sommes pas aux niveaux des chefs-d'oeuvre précités, mais ce Ricky Stanicky est plutôt une bonne surprise, les films impertinents étant assez rares.

 Bande-annonce Ricky Stanicky

dimanche 17 mars 2024

6 Days (1h34, 2017) de Toa Fraser

Avec  Jamie Bell, Mark Strong, Abbie Cornish, Martin Shaw, Tim Pigott-Smith, Ben Turner, Emun Elliott, Aymen Hamdouchi, Andrew Grainger, Colin Garlick, Colin Moy, Toby Leach.

Reconstitution de la prise d'otage et tentative d'attentant de l’ambassade d'Iran à Londres en 1980. Il s'agit d'un film historique donc, reconstituant l'évènement, raconté par Toa Fraser du point de vue du négociateur, de la police et des forces spéciales qui se préparent et s'entrainent pour intervenir, soit dans l'ambassade, soit dans le bus qui transportera les otages ou pour débarquer par les airs. C'est un des éléments intéressant de ce film : nous présenter les réflexions et stratégies de la police et du négociateur qui interagissent avec les politiques, ainsi que les interactions du négociateur avec les preneurs d'orages et enfin les entraînements des forces d'intervention, qui se préparent en temps réels en fonction de l'évolution de la prise d'otage et surtout de l'évolution supposée de l'environnement des terroristes et des otages. 

Ce n'est pas divulgacher le film que de dire que sa force et de montrer l'envers du décors de la force d'intervention, qui passe son temps à se tenir prête, et qui sur ordre, finalement n’intervient pas parcequ'un évènement est survenu et conduit à modifier les plans.

Au total le film nous montre comment le négociateur essaie en permanence de faire appel à leur bon sens et finalement comment il arrive à créer un lien avec le responsable des preneurs d'otages qu'il arrive à maîtriser. Un film correct donc, sans brio, mais qui tien en haleine jusqu'au bout.

Bande-annonce 6 Days

Destroyer (2h01, 2018) de Karyn Kusama

Avec  Nicole Kidman, Toby Kebbell, Tatiana Maslany, Sebastian Stan, Scoot McNairy, Bradley Whitford, Toby Huss, James Jordan, Beau Knapp.

Je suis une flic la limite du suicide. J'ai été infiltrée dans un gang. Je m'en suis sortie au détriment de mon collègue. J'ai du mal à le digérer. Et lorsqu'il semblerait que l'ancien chef du gang réapparaît. je n'ai qu'une envie et qu'une peur, le retrouver.

Sur cet argument Karyn Kusuma conduit son histoire en combinant de manière trop mécanique les séquences actuelles où Nicole Kidman recherche le chef de gang, et les flashbacks de son époque d'infiltration du dit gang. La multitude et l'imbrication des flashbacks réduit la lisibilité de l'histoire.

Nous retiendrons la performance de Nicole Kidman, qui joue un personnage qui n'est jamais dans la séduction, qui bannie toute sensualité dans son attitude ou dans ses vêtements. Performance qui manque de subtilité dans sa manière de montrer la déchéance du personnage et son jusqu’au-boutisme. Nicole Kidman en fait des tonnes dans la mâchoire serrée et la déchéance.

Une curiosité.

Bande-annonce Destroyer

samedi 16 mars 2024

Le Flic De Beverly Hills III (1h44, 1994) de John Landis

Avec Eddie Murphy, Jon Tenney, Judge Reinhold, Hector Elizondo, Rick Avery, Jimmy Ortega.

Ce troisième de franchise reprend le personnage d'Eddy Murphy selon une schématique déjà vu dans les précédents. Mais ici le film se déroule principalement dans un centre d'attraction, ce qui limite les décors et les visuels du film. Le scénariste, Steven E. de Souza, cette franchise est comme un parc d'attraction, et bien déroulons l'intrigue dans un parc d'attraction.

Quelques éléments pointe le style de John Landis. Mais la greffe ne fonctionne pas trop dans l'ensemble. Peut-être au niveau du rythme car le film d'action n'est pas la spécialité de John Landis. Par contre John Landis sait amener de l'humour légèrement décalé dans des genres préexistants.
Même si cela fonctionne, et que Eddie Murphy fait son show ainsi que les rôles secondaires (Judge Reynolds ou Bronson Pinchot) de la franchise, nous restons un peu sur notre faim. Ce troisième opus est ainsi moins réussit.

Le Flic de Beverly Hills III [Version remasterisée]


The Expendables 4 (Expend4bles, 1h44, 2023) de Scott Waugh

Avec Jason Statham, 50 Cent, Megan Fox, Dolph Lundgren, Tony Jaa, Iko Uwais, Andy Garcia, Sylvester Stallone, Randy Couture, Jacob Scipio, Levy Tran, Lucy Newman-Williams.

Ce quatrième de franchise est dans la lignée des précédents. Complètement invraisemblable dans son déroulé, dans ses séquences d'action et dans son enjeu dramatique. D'ailleurs nous nous moquons de celui-ci. Et nous pourrions même dire qu'il n'y en a pas. Ce que nous attendons c'est du spectacle, des séquences d'actions dignes d'une bande dessinée, et de l'humour pour rendre les séquences de meurtres amusantes et ludiques. Pour toutes ces raisons, ce quatrième répond au cahier des charges. C'est un dessin animé, qui utilise beaucoup de CGI porn dont la patine n'est pas réaliste et c'est tant mieux ; nous avons quelquefois l'impression de visionner une peinture, animée, une représentation picturale. Scott Waugh, qui est ancien cascadeur, sait mettre en avant une séquence d'action.

Du côté des bonnes surprises, Megan Fox est une très bonne idée, ainsi que Levy Tran. Même si elles n'ont pas assez de scènes. La venue de Tony Jaa et Iko Uwais aussi. Cela apporte un peu de variabilité. Quant à Andy Garcia, il fait le job, même si son personnage est transparent et pas surprenant.

Les séquences d'actions sont spectaculaires et ludiques. Nous pouvons juste constater qu'ils tirent très mal, car ils loupent souvent leur cible, et ceci dans les deux camps. Ce sont des professionnels peu performants.

L'idée de passage de témoin de Sylvester Stallone est bonne : un vieillard comme lui n'est plus crédible.

Mais au total il manque quelque chose au film qui avait au moins les deux précédentes suites. C'est-à-dire les personnages un peu plus fouillés ou décalés, par exemple Antonio Banderas ou Jean-Claude Van Damme ou Wesley Snipes.

Expendables 4 [Blu-Ray]

La Zone D'Intérêt (The Zone Of Interest, 1h45, 2023) de Jonathan Glazer

Avec Christian Friedel, Sandra Hüller, Johann Karthaus, Luis Noah Witte, Nele Ahrensmeier, Lilli Falk, Anastazja Drobniak, Cecylia Pekala, Kalman Wilson,  Medusa Knopf,  Max Beck, Slava the Dog, Andrey Isaev.

Avec le prétexte de présenter la vie de famille du responsable du camp de concentration d'Auschwitz, Jonathan Glazer nous parle de l'indifférence, des rapports de classes, des rapports entre maître et esclaves, des rapports entre dominants et dominés, tout cela en laissant le spectateur appréhender ce qu'il souhaite. Bien sûr toutes ces composantes possèdent des échos contemporains, et c'est là la force du film. En parlant du passé, il parle du présent. Les comportements qui sont montrés existent toujours, sont toujours contemporains, et au-delà du sujet historique et donc du coté film historique avec reconstitution et travail de recherche qui indique que tout cela est très documenté, il s'agit bien d'un film moderne, contemporain, qui montre ce début de XXIe siècle. Le film parle très bien de l'indifférence aux autres et de ses conséquences et donc de l'individualisme : Rudolf Höss est individualiste, sa femme est individualiste.

Autre dimension qui fait du film une réussite : sa forme. Du travail sur la bande son, impressionnante, des minutes avec l'écran noir au début, des images de la petite fille avec les pommes, à la luxuriance des images et de jardin qui ressemble à un paradis (dixit le personnage de Sandra Huller). Jonahan Glazer a composé un film expérimental impressionnant sur sa forme, son contenu et ses messages. C'est-à-dire que Jonathan Glazer a réalisé trois films en un. Le premier film est la bande-son, extrêmement riche, qui d'ailleurs est mise en avant pendant l'écran noir au début du film. Le deuxième est celui que nous voyons, les images de la vie courante de ces personnes, et le troisième est celui constitué de la résultante des deux, les images et le son.

Une expérience et une richesse inouïe qui montrent que le cinéma peut être politique, sociétal, sur une base narrative, tout en étant un film expérimental. Bravo.

Bande-annonce La Zone d'intérêt

Le Flic De Beverly Hills 2 (1h40, 1987) de Tony Scott

Avec Eddie Murphy, Judge Reinhold, Jürgen Prochnow,  Ronny Cox, John Ashton, Brigitte Nielsen, Allen Garfield, Dean Stockwell, Paul Reiser, Gilbert R. Hill, Paul Guilfoyle, Robert Ridgely.

Eddie Murphy revient à Beverly Hills. Nous y retrouvons les constituants que nous avions aimés dans le premier de franchise : les contrastes culturels, le duo constitué de Judge Reinholds et John Ashton. Mais aussi les méchants que nous aimons détester, Jürgen Prochnow, Brigitte Nielsen et Dean Stockwell dans les rôles des méchants : superbe distribution.

Le film est co-écrit par Eddie Murphy. Il s'est donc investi. La même recette avec les même ingrédients produisent le même résultat, l'effet de découverte et de surprise en moins. Un film qui se veut cool, sans réel enjeux dramatique, mais que se laisse suivre. Ce deuxième de franchise fonctionnne même s'il n'y a plus l'effet de découverte. Il manque peut être juste de brillance, du côté grisant, que pouvait procurer le premier de franchise.

Le Flic de Beverly Hills II [Version remasterisée]

L'Eté Dernier (1h44, 2023) de Catherine Breillat

Avec Léa Drucker, Samuel Kircher, Olivier Rabourdin, Clotilde Courau,  Serena Hu,  Angela Chen, Romain Maricau, Romane Violeau, Marie Luca.

Catherine Breillat signe là un film puissant, par sa forme avec sa mise en scène, et part son sujet. Sa mise en scène raconte l'histoire et ceci avec assez peu dialogues. La réalisatrice fait passer beaucoup de choses et conte sans recours à des dialogues explicites, uniquement par la mise en scène, ce qui est la forme d'expression du cinéma bien sûr : raconter l'histoire par la mise en scène. 

L'autre force, est aussi sa thématique et son sujet dans cette famille ou le père, la mère et les enfants entretiennent mutuellement de drame. À noter qu'il s'agit du remake d'un film danois de 2019 (Dronningen, de May El-Toukhy).

Léa Drucker porte le film, car il s'agit de l'histoire de son personnage, qui évolue, ou pas, au cours de l'histoire, qui est le plus passionnant, central donc et est celui qui est de toutes les scènes. Elle apparaît froide dans son cadre professionnel, jusqu'à son évolution tout au cours du film, au gré des interactions avec son beau fils, source du principal arc dramatique du film. Elle est en maîtrise, quels que soient ses interlocuteurs : son mari, ses filles, sa sœur, son beau fils. Même si celui-ci va la mettre en danger.

L'avantage du film est que, en tant que spectateurs, nous avons beau imaginer les évolutions possibles de l'histoire,  ainsi qu'imaginer les fins possibles de l'histoire, le scénario et Catherine Breillat sont capables de faire évoluer l'histoire ou de conclure d'une manière que nous n'avions pas imaginée.
 
Bande-annonce L'Été dernier

Le Daim (1h17, 2019) de Quentin Dupieux

Avec Jean Dujardin, Adèle Haenel, Albert Delpy, Coralie Russier, Laurent Nicolas, Marie Bunel, Stéphane Jobert.

Quentin Dupieux a composé pour une fois une histoire linéaire, prévisible, mais avec son lot de points distinctifs. La passion et la folie de Jean Dujardin pour le Daim, qui semble basculer suite à une rupture (peu nous en est dit, et c'est très bien). Il croise une caméra. Il croise Adèle Haenel qui rentre dans son jeu. Pour aller au bout de sa folie, qui sera stoppée nette le moment venue.

Le réalisateur questionne encore une fois son travail d'artiste, son travail de réalisateur à travers ce pauvre personnage paumé qui imagine filmer quelque chose tout en ne sachant rien du processus de création d'un film. Il ne s'agit pas bien sûr d'une métaphore du réalisateur lui-même qui est un spécialiste de la construction de film dans tout ses composantes mise en scène scénario prise de vue photographie montage production. Mais ce qui est intéressant chez ce réalisateur c'est que sa matière est le spectacle, le film, le narratif, le drame. Quentin Dupieux ne sait que parler des films. Et c'est tant mieux. Ici il parle du film d'horreur comme genre, et d'un film d'horreur, qui se construit sous nos yeux, même si la musique de Quentin Dupieux appuie fortement dès le début du film, à la limite du ridicule, mais le spectateur n'est pas trompé sur la marchandise lorsque les images tournées par Jean Dujardin sont montrées au spectateur.

Bande-annonce Le Daim

Yannick (1h03, 2023) de Quentin Dupieux

Avec Raphaël Quenard,  Pio Marmaï, Blanche Gardin, Sébastien Chassagne, Agnès Hurstel, Jean-Paul Solal, Laurent Nicolas, Mustapha Abourachid, Sava Lolov.

Le réalisateur signe son film le plus linéaire, à défaut d'être limpide. Nous savons que Quentin Dupieux parle très souvent voire quasiment toujours du film, de l'oeuvre d'art, de sa manière de la faire, de son impression qu'elle fait sur le spectateur. Ici il questionne ce qu'est une œuvre d'art et le rapport du spectateur à celle-ci. Ceci par le biais d'une pièce de théâtre d'assez peu bonne qualité que Raphaël Quenard regarde comme spectateur et décide de la modifier, de la réécrire. En interprétant un personnage que nous comprenons comme étant plutôt dépressif, et plus simplement qui ne va pas bien du tout.

Le dispositif de mise en scène est simple et limpide pour mettre en valeur les dialogues : à la fois ceux de la pièce de théâtre, et ce du personnage de Raphaël Quenard. Il y a un gros travail sur cet aspect-là.

Nous ne sommes donc pas ici dans un procédé qui pourrait paraître absurde comme dans beaucoup de films du réalisateur. Mais c'est quelque part un film qui explique comment appréhender tous les films précédents de Quentin Dupieux. Le personnage de Raphaël Quenard n'est-il pas Quentin Dupieux ? Questionnant les films et ce qu'ils sont censés apporter à leur spectateur. Il pourrait arrêter maintenant et nous comprendrions toute son œuvre.
Il est surprenant de voir arriver les policiers à la fin. Cela ancrant le film dans une réalité à laquelle Quentin Dupieux ne nous a pas habitué. Une manière de rendre réel le constat fait par le personnage de Raphaël Quenard.
Bande-annonce Yannick

jeudi 22 février 2024

The Abandoned (2h08, 2022) de Ying-Ting Tseng

Avec Janine Chun-Ning Chang, Ethan Juan, An-Shun Yu, Chloe Xiang, Sajee Apiwong, Wei-min Chen, Hsueh Shih-ling, Teng-Hui Huang.

Une policière dépressive (elle est sur le point de se suicider dans le premier plan d'un flm) enquête sur le meurtre d'une jeune thaïlandaise quelle retrouve par hasard.  D'autres disparition suivront. Les corps sont mutilés. S'agit-il d'un tueur en série ? Elle mène l'enquête et arrive à remonter : il s'agit de fille en situation irrégulière à Taiwan ; elles arrivent de Thaïlande. Mais certains disparaissent et son retrouvées avec des organes en moins.

Le tout se déroule souvent de nuit et souvent sous la pluie, dans une ambiance noire, dépressive, très réussit. Notre enquêtrice n'est pas une super héroïne, et la police Taïwanaise n'a pas l'air non plus très performance. Janine Chun-Ning Chang porte le film et mène l'enquête avec difficulté.

Le film est une réussite dans son genre. Il maintient l'attention du spectateur jusqu'à l'identification du coupable et son affrontement avec la policière.

The Abandoned affiche film

lundi 12 février 2024

Le Flic De Beverly Hills (Beverly Hills Cop, 1h45, 1984) de Martin Brest

Avec Eddie Murphy, Judge Reinhold, John Ashton, Lisa Eilbacher, Ronny Cox, Steven Berkoff, James Russo, Jonathan Banks, Stephen Elliott, Gilbert R. Hill, Art Kimbro, Joel Bailey, Bronson Pinchot, Paul Reiser, Michael Champion.

Il s'agit du premier film de la franchise qui a starisé Eddy Murphy. Mélange d'enquête policière et de comédie où le personnage d'Eddy Murphy et ses deux acolytes de la police de Berverly Hills (Judge Reinhold et John Ashton) provoquent la distanciation cool et l'humour. Le contraste entre le style de police de Détroit  d'où vient Eddy Murphy et la police de Beverly Hills est le moteur du scénario : la différence culturelle et d'ingénierie sociale. Bronson Pinchot amène aussi des éléments d'humour. Du côté des méchants nous avons Steven Berkoff, parfait. Et il est toujours agréable de revoir la sous-estimée Lisa Eilbacher.

La dynamique fonctionne, avec une dose limitée de séquences d'action, mais juste ce qu'il faut. Car ici ce sont les personnages qui comptent et qui font la saveur. D'ailleurs le film commence avec une poursuite avec multiples tôles froissées, qui est plutôt la séquence finale de certains films. Comme pour dire, la voilà, elle est faite, maintenant nous pouvons nous consacrer aux personnages et aux chocs culturels. La musique d'Harold Faltermeyer est aussi marquante. Elle contribue à l'empreinte mémorielle du film. Qui est un manifeste de l'esthétique et parfum des années quatre-vingt.

Bande-annonce Le Flic de Beverly Hills

dimanche 11 février 2024

Le Fléau De Breslau (1h50, 2018) de Patryk Vega

Avec Malgorzata Kozuchowska, Daria Widawska,  Katarzyna Bujakiewicz, Andrzej Grabowski, Maria Dejmek, Ewa Kasprzyk, Jacek Beler, Wojciech Kalinowski, Iwona Bielska, Igor Kujawski.

Beau film policier dans sa variante traque de tueur en série. Avec ici un gros rebondissement à mi-parcours qui relance encore plus la tension. Cela se déroule dans la ville de Breslau, où une policière dépressive enquête sur des meurtres extrêmement mis en scène par un tueur en série. Elle n'est pas aidée par la police locale (dont elle fait partie), elle est aidée par un profiler qui arrive de la capitale, qui va faire progresser l'enquête à grands pas.

Le film contient pas mal de gore, c'est-à-dire de corps sculptés par notre tueur en série. Il y a régulièrement de petits éléments surprenants, puis de petites circonvolutions dramatiques, qui font que le spectateur suit cela de manière assidue et se demande comment cela va évoluer. Rajoutons que notre policière dépressive n'est pas du tout impressionnée par ces meurtres ; et que la profileuse s'avère être plutôt déjantée et obsessive.  Cela donne une variante originale du film de traque de tueur en série. Variante qui incorpore des dimensions sociales, une utilisation mesurée de la technologie numérique, de l'humour noir de bon aloi, du gore sans timidité. Pour finir sur une explication finale de la résolution de l'enquête et de la fin de série de meurtres qu'il est difficile de deviner et d'imaginer. Bien vu. Nous en redemandons. 

 Bande-annonce Le fléau de Breslau


samedi 10 février 2024

Black And Blue (2019, 1h48) de Deon Taylor

Avec Naomie Harris,  Tyrese Gibson, Frank Grillo, Mike Colter, Reid Scott, Beau Knapp, Nafessa Williams, James Moses Black.

Superbe polar où des policiers corrompus dans le traffic de drogue traquent une policière car elle a été témoin de quelque chose qu'il ne fallait pas et risque de les compromettre. Pour s'en sortir elle essaye de compter sur la population locale, puis sur ses collègues flic et aussi compter sur des gangs qui ne sont pas encleins à l'aider de prime abord. Noamie Harris est donc coincée dans un labyrinthe dont l'objectif est la survie.

Belle distribution avec Naomi Harris et Tyrese Gibson dans une performance subtile. Avec une direction d'acteur efficace, des reconstitutions et décors qui ont l'air naturels tout en étant très sombres avec à la photographie Dante Spinotti, que l'on ne présente plus : tout cela conduit par un scénario qui gère parfaitement chacun des arcs dramatiques et leurs mélanges, signé par Peter A. Dowling qui connait son métier. Le principe dramatique est que le spectateur se demande comment elle va s'en sortir sachant que tout le monde souhaite sa mort et que plus l'histoire les obstacles sont de plus en plus importants. Il s'agit donc d'un film bien née. La grande réussite du film est son climat sombre, nihiliste, où la loi n'a presque pas de place.

Il s'agit d'un beau travail de poursuite avec une tension qui va crescendo de manière permanente.

 Bande-annonce Dirty Cops

jeudi 8 février 2024

The Professor And The Madman (2h04, 2019) de Farhad Safinia

Avec Mel Gibson, Sean Penn, Eddie Marsan, Natalie Dormer, Jennifer Ehle, Steve Coogan, Stephen Dillane, Ioan Gruffudd, Jeremy Irvine, Laurence Fox, Anthony Andrews, Lars Brygmann.

Il s'agit de l'histoire, inspirée de faits réels, de la création du premier dictionnaire d'Oxford. Le personnage de Mel Gibson est en charge du projet. Sean Penn est un enfermé en hôpital psychiatrique que va l'aider car il s'agit de recenser une ensemble de mots et connaissance des écrits et sa folie vont être utiles. Le film imbrique tout cela avec une histoire de lutte des classes du coté de Mel Gibson et de rédemption du coté de Sean Penn. Le scénario est plutôt habile en arrivant à rendre cette histoire plutôt captivante. Que le film soit inspirés de faits réel nous importe peu. Mais il manque au film quelque chose, pour nous intéresser pleinement, pour que nous nous sentions concernés.

La direction d'acteur est peu subtile. Les acteurs croient à leurs personnages. Mais Sean Penn en fait des tonnes. Mel Gibson est plus sobre. Les crédits techniques sont parfaits, cela va sans dire, décors, costumes, photographie, maquillages, tout est au top. Mais nous restons sur notre faim, peut être par manque d'empathie. Nous n'en avons pas avec le personnage de Sean Penn ; ses turpitudes nous indiffèrent. Nous en avons un petit peu avec celui de Mel Gibson. Mais son personnage n'évolue pas, reste en retrait, ne manifeste pas beaucoup de proactivité. Le fait que ce soit une histoire vraie ne garantie pas l'intérêt du film.

Au total, une curiosité pour le sujet principalement, la création d'un première dictionnaire des mots de la langue.

 Bande-annonce The Professor And The Madman

dimanche 4 février 2024

Trois Mille Ans à T'Attendre (Three Thousand Years of Longing, 1h48, 2022) de George Miller

Avec Tilda Swinton, Idris Elba, Erdil Yasaroglu, Sarah Houbolt, Sabrina Dhowre Elba, Seyithan Özdemir,  Aamito Lagum, Nicolas Mouawad, Ece Yüksel.

Entre deux épisodes de la franchise Mad Max, George Miller signe (il est coscénariste) un film inclassable, hors du temps, à la fois par son sujet, mais aussi par sa direction artistique et son traitement. Nous pourrions même dire que le film est complètement en décalage de ce qui se produit ces dernières années.

Ce qui finalement le rend curieux, pas indispensable, mais intéressant. Sur sa forme, car le film a bénéficié de moyens. Sur son sujet à base de génie (Idris Elba, solide) qu'une spécialiste des cultures (Tilda Swinton, émouvante) fait apparaître et lui raconte son histoire. Avec moult époques, décors, personnages qui font la richesse visuelle du film. Il faut reconnaître que cette histoire de génie parait anachronique et n'est que faiblement passionnante. Mais il faut considérer ce film, car lorsqu'un Artiste comme George Miller s'y intéresse, le créé (direction artistique, mise en scène, scénario) c'est que c'est forcément intéressant, qu'il y a quelque chose. Nous y retrouvons une partie de son bestiaire et de ses préoccupations.

Au total le film parle de solitude et d'amour. Sous ses oripeaux de film mystérieux, fantastique, se cache le portrait de plusieurs solitudes, qui se rencontrent et qui s'aiment. Dit comme cela, on pourrait presque se croire chez Aki Kaurismäki, mais pas du tout, nous sommes dans un univers fantastique très travaillé.

 Bande-annonce Trois Mille ans à t’attendre

mardi 30 janvier 2024

Titane (1h48, 2021) de Julia Ducournau

Avec Vincent Lindon, Agathe Rousselle, Garance Marillier, Laïs Salameh, Mara Cisse, Marin Judas, Diong-Kéba Tacu, Myriem Akheddiou,  Bertrand Bonello, Céline Carrère,

Un film de monstres. Là où Julia Ducournau réussit son pari est dans l’enchaînement des différentes histoires : les pérégrinations de tueuse d'Agathe Rousselle puis sa fuite ; sa rencontre avec Vincent Lindon et leur vie commune ; puis la bascule dans la folie (si elle n'était pas déjà là), dans la monstruosité ou autre chose de Vincent Lindon.

Julia Ducournau réussi son pari avec un ensemble passionnant, fulgurant, qui mêle horreur, mais aussi empathie. Après avoir montré son personnage monstrueux, sans empathie, sa rencontre avec Vincent Lindon va l'humaniser ou si peu, mais arriver à nous faire avoir de l'empathie, d’abord avec le personnage de Vincent Lindon, puis avec elle, car elle semble trouver un semblant de satisfaction à sa relation avec ce pompier, perdu ou fou ou sous emprise chimique, qui l'accueille (pour une raison que nous ne divulgâcherons pas), mais qui relance l'histoire.

La décision de toujours montrer du point de vue du personnage d'Agathe Rousselle est le bon choix. Nous ne voyons jamais la police qui la recherche (hormis le spot sur l'écran de télévision). Cela ne nous intéresse pas. Et tout laisse à penser que l'issue de l'histoire ne pourra qu'être tragique. Mais pour quoi.

Le talent de Julia Ducournau est d'avoir créé un film inclassable, unique, sans précédent (même chez David Cronenberg), oeuvre d'art brut, puissante, perturbante, qui ne provoque pas de débat (on adore ou on déteste), mais qui fait réfléchir. La force du film est de ne pas expliquer d'où viennent les personnages et de ne pas permettre de deviner où ils vont. Un chef d’œuvre.

Bande-annonce Titane

dimanche 28 janvier 2024

La Fille Du Roi Des Marais (The Marsh King's Daughter, 1h49, 2023) de Neil Burger

Avec Daisy Ridley, Ben Mendelsohn, Brooklynn Prince, Gil Birmingham, Caren Pistorius, Garrett Hedlund, Joey Carson, Joshua Peace, Pamela MacDonald, Dan Abramovici.

Nous sommes ici dans une canevas d'histoire classique où après une exposition pour établir un arrière plan, un évènement majeur va faire revenir le passer et faire basculer le film en thriller.

Dans les ingrédient pour incarner ce canevas nous avons un couple et leur enfant qui vivent dans les marais, en se nourissant de chasse et de ce que offre la nature. Le père est tyrannique et maltraite sa femme. Mais il éduque sa fille à la dure pour savoir vivre et survivre dans un univers de nature. Elle quittera sa famille pour mener une vie normale. Mais son passé, et surtout son père vont revenir la hanter et elle devra gèrer et règler toute seule la situation, sur le terrain, dans les marais.

Bon suspense, belle prestation de Daisy Ridley, qui porte ce film sur ses épaules. Le père, Ben Mendelsohn est plus caricatural et typé, monolithique et ne surprend donc pas. Et le film dans son ensemble est assez prévisible et ne surprend pas, même s'il fonctionne. Nous noterons la très réussi séquence où Daisy Ridley suspecte que son père rode dans sa maison ou à l'extérieur : beau travail d'interprétation et de climat, par le travail de la photographie, du soin et du montage pour créer la tension. Neil Burger sait traiter ce sujet. Nous ne connaissons par Divergente (2014) mais nous apprécions The Illusionist (2006) ou The Upside (2017) son remake réussit de Intouchables (2011), et son Limitless (2011) possède parait-il de bonnes qualités.

Bande-annonce La Fille du roi des marais

samedi 27 janvier 2024

Yara (1h36, 2021) de Marco Tullio Giordana

Avec Isabella Ragonese, Alessio Boni, Thomas Trabacchi, Sandra Toffolatti, Roberto Zibetti, Mario Pirrello, Miro Landoni, Andrea Bruschi, Augusto Zucchi, Rodolfo Corsato.

Une adolescente disparaît et est retrouvée morte après avoir été violée. Le procureur qui enquête va devoir affronter la mysogynie ambiante. La procureure est interprétée par Isabella Ragonese. Mais l'enquête va avoir aussi la difficulté à trouver des indices. A une époque où le numérique n'existait ainsi, ainsi que les fichiers d'empreintes digitales centralisés. Ce qui fait que pour retrouver un coupable à partir d'indice prend beaucoup de temps, demande un peu de chance et de coincidences, de persistence et de patience.

Fausses pistes, enquête sur plusieurs années, pour un film policier où 'enquête avance par petite touche et l'enquête évoluera vers de fausses pistes, car il est urgent de trouver un coupable, mais aussi vers des pistes possibles à partir des tests ADN et leur utilisation à grande échelle. Le scénariste est un vétéran du scénario : nous pouvons dire qu'il s'agit d'une bonne histoire, qui captive le spectateur, qui se demande s'il le tueur va être retrouvé. La forme est celle d'un téléfilm Netflix c'est à dire sans aucune ambition. Dispensable sur la forme, mais honnête sur le sujet.

Yara

vendredi 26 janvier 2024

Là Où Chantent Les Ecrevisses (Where the Crawdads Sing, 2h05, 2022) de Olivia Newman

Avec Daisy Edgar-Jones, Taylor John Smith, Harris Dickinson, David Strathairn, Michael Hyatt, Sterling Macer Jr., Logan Macrae,  Bill Kelly, Ahna O'Reilly, Garret Dillahunt, Jojo Regina, Luke David Blumm.

Voici un matériel constitué de multiples richesses. La nature et les marais, où vit une petite fille et qui y grandit. Un corps est retrouvé, et elle est accusé car il s'agit d'un ancien amant. Elle a aussi une histoire d'amour. Elle dessine et cartographie la faune et la flore du marais. Thriller policier dans les marais et ode à la nature, aux plantes et animaux sont les ingrédients de cette histoire. Avec les messages qu'il faut sur le respect et la beauté de la nature. Et avec les éléments qui font que le comportement de cet environnement déteint sur sa personnalité et son rapport aux autres humains.

Sur le plan des décors et paysages le film est très beau. La reconstitution est réussit - nous sommes dans les années 50 et 60 - dans le sud. Les chromos, non pas du rêve américain, mais des petites gens, sont présents. La distribution est très bonne : Daisy Edgar-Jones sait faire ressortir de son personnage tout à la fois la force, vigueur et fragilité. Elle éclipse d'ailleurs les autres, qui sont des faire-valoir et paraissent fades.

Enfin le film contient une révélation à la toute fin qui donne tout sel à l'histoire qui a précédée, bien orchestrée et conduites, qui sinon commençait à paraître longue (125 minutes de durée quand même).

Bande-annonce Là où chantent les écrevisses

jeudi 25 janvier 2024

Anatomie D'Une Chute (2h31, 2023) de Justine Triet

Avec Sandra Hüller, Swann Arlaud, Milo Machado Graner, Antoine Reinartz, Samuel Theis, Jehnny Beth, Saadia Bentaïeb, Camille Rutherford, Anne Rotger,

Nous sommes ici dans quelque chose de sérieux. Histoire et scénario très travaillés, écrits, pour un ensemble qui s'écoule fluidement entre l'histoire de Sandra Hüller et son mari, égrenée en flashbacks, sa relation avec son avocat, sa relation avec son fils, et ceci malgré la durée de 2h30. C'est le signe d'un film dense dans ses thématiques, dans sa forme dramatique, qui emporte l'adhésion du spectateur. Le film aborde la vie de couple, la bisexualité, le rôle de la femme dans un couple, ou par exemple le fait que ce n'est pas la vérité qui est analysée dans un procès. Car à partir du point de départ, le décès du père, s'en suit une enquête réalisée depuis le point de vue de la mère ou d'autres personnages, pour supporter l'argumentaire de l'avocat, et ensuite suivre le procès. C'est là où le film est intéressant : nous ne sommes pas du point de vue de la police ou d'enquêteur, mais nous sommes du point de vue de l'avocat qui prépare le procès.

Le fait que l'enfant soit aveugle fait le sel du scénario et permet certains de ses rebondissements. Ce truc de scénariste, ou pas, est parfait pour gérer les rebondissements de la progression dramatique.  C'est vraiment très écrit et pensé.

Sur la forme, la diégèse est tellement dense, que le travail de la photo est plat, un peu fade, transparent, voire télévisuel. Mais le film n'est pas sur sa forme. Le film contient par ailleurs peu de musique, et cela fonctionne très bien.

Le film se permet aussi de maintenir un certain mystère concernant le personnage de Sandra Hüller, y compris à la fin du film.

Bande-annonce Anatomie d’une chute


mercredi 24 janvier 2024

Astérix & Obélix : Mission Cléopâtre (1h47, 2002) de Alain Chabat

Avec Gérard Depardieu, Christian Clavier, Jamel Debbouze, Monica Bellucci, Monica Bellucci, Claude Rich, Gérard Darmon, Edouard Baer, Dieudonné, Mouss Diouf, Marina Foïs, Bernard Farcy, Jean Benguigui, Michel Crémadès, Jean-Paul Rouve, Edouard Montoute, Noémie Lenoir, Chantal Lauby.

Astérix et Obélix sont des personnages secondaires et le lien avec la bande dessinée est ténue. Ils ne sont d'ailleurs que peu présents à l'écran. Le star étant plus Jamel Debbouze dans le rôle de l'architecte à qui Cléopatre (Monica Bellucci, parfaite) ordonne la construction d'un palais et d'une pyramide pour impressionner César (Alan Chabat dans un rôle de débile).

Jamel Debbouze fait son show, et cela fonctionne. Gérard Darmon est bon en méchant. Leur affrontement en mode kung-fu pastichant Bruce Lee est très sympathique. Mais nous sommes très loin de celle de Jim Carrey et les frères Farrelly dans Dumb and Dumber (1994).

Dans son ensemble, au delà de certaines scènes et gags pris individuellement, le film reste poussif et manque cruellement de dynamique. Toutes les scènes où apparaissent Astérix et Obélix pourraient être retirées, cela ne changerait rien et réduirait la durée du métrage.

Bande-annonce Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre

Chernobyl Under Fire (2h16 2021) de Danila Kozlovskiy

Avec Danila Kozlovskiy, Oksana Akinshina, Filipp Avdeev, Ravshana Kurkova, Nikolay Kozak, Igor Chernevich, Artur Beschastnyy, Nikolay Samsonov, Anton Shwartz.

Ce Chernobyl se concentre sur les pompiers qui sont intervenus pour éteindre le premier incendie juste après l'explosion du réacteur. Pour susciter l'empathie, le scénario se concentre sur un de ces pompiers, qui retrouve son ancienne amante à Chernobyl et qui se rend compte qu'elle a un enfant, dont il est probablement le père. Cela occupe un long prologue, bien interprété, sympathique. Ensuite il y a les séquences spectaculaires liées à l'intervention vers la centrale nucléaire après l'explosion.  Le scénario se concentre sur les deux personnages : le pompier, Danila Kozlovskiy, et sa fiancée Oksana Akinshina. Les acteurs sont bons et l'ensemble fonctionne, même si le film tarde à démarrer.

Le sujet est tellement fort qu'il n'est pas possible d'être insensible à certaines séquences. La séquence des trois pompiers dans l'eau pour arriver à ouvrir l'évacuation de l'eau est le grand moment du film, spectaculaire et avec une tension maximale bien sûr car ils descendent dans les sous-sol de la centrale, dans le noir et juste à la lumière de leur torche. Elle est bien faite et monte bien la tension avec régularité et est impressionante.

Finalement les 2h16 passent toutes seules, même si l'intrigue concernant le couple (notre pompier, son ex) nous ennuie franchement. Surtout que les scénaristes, pour être sûr de l'empathie, on mis le fils comme première victime de l'explosion et des radiations, ce qui donne lieu à aux séquences où le couple souhaite qu'il soit évacué, soigné, sachant qu'il n'est pas possible de soigner, évacuer tout le monde.

Chernobyl : Under Fire [Blu-Ray]

dimanche 21 janvier 2024

Seule Contre Tous (The Whistleblower, 1h52, 2010) de Larysa Kondracki

Avec Rachel Weisz, Vanessa Redgrave, Monica Bellucci, David Strathairn, Nikolaj Lie Kaas, Roxana Condurache, Paula Schramm, Alexandru Potocean, William Hope, Rayisa Kondracki.

Rachel Weisz est une policière qui part en volontariat pour une mission de maintien de la paix en Bosnie. Où elle va découvrir des choses illégales qui vont être difficiles à enquêter, à instruire, car corruption sévit de partout. Rachel Weisz est une lanceuse d'alerte, mais que personne ne veut prendre en compte. Elle devra affronter ses collègues, la police locale, sa hiérarchie, les différentes mafias, entre autres et seule contre tous.

Le film montre aussi les atavismes dans cette Bosnie : misogynie, patriarcat, racisme, haines interculturelles. Le film dose bien l'ensemble des composantes. Enquête, corruptions, vie locale, vie d'une organisation transnationale, la loi, à qui elle s'applique et les impunités.

Rachel Weisz incarne le personnage avec force et vigueur, comme à chaque fois. Elle porte le film sur ses épaules.

Bande-annonce Seule contre tous

samedi 20 janvier 2024

Cash (1h35, 2023) de Jérémie Rozan

Avec Raphaël Quenard, Igor Gotesman, Agathe Rousselle, Antoine Gouy, Youssef Hajdi, Grégoire Colin, Nina Meurisse, Bruno Lochet, Laure Sirieix, Stéphan Wojtowicz, Nicolas Martinez, Slimane Dazi.

Superbe distribution pour une un film où des employés qui gèrent un entrepôt détournent à leur profit une partie de la production. La bande est pilotée par Raphael Quenard. Ils commencent petits puis l'équipe grandit. Le tout dans un contexte ou l'usine va être vendu. Ce qui permet au film d'adresser la vie en usine, l'organisation de l'usine, entre le patron, le responsable des ressources humaines, le chef d'équipe.

La première qualité du film est que bien que nous devinons peu ou prou ce qui peut se passer, la progression est simple et régulière, maintenant l'intérêt du spectateur, contenant ce qu'il faut d'ellipse pour produire ce qu'il faut de suprises, bien placées. Le scénario ménage et mélange bien les deux progressions dramatiques : l'équipe de Raphaël Quenard d'un côté, et l'intrigue du côté du patron, intrigues qui vont bien sûr se rejoindre. 

À noter que la voix off, du personnage de Raphaël Quenard fonctionne parfaitement bien et n'alourdit pas la narration.

Une autre qualité est sa superbe distribution, Raphaël Quenard en tête, mais aussi Agathe Rousselle, Brunot Lochet, Stephan Wojtowicz, par exemple. Tous parfaits.

Bande-annonce Cash

vendredi 19 janvier 2024

Tout De Suite Maintenant (1h38, 2016) de Pascal Bonitzer

Avec Agathe Bonitzer, Vincent Lacoste, Lambert Wilson, Isabelle Huppert, Jean-Pierre Bacri, Julia Faure, Pascal Greggory, Virgil Vernier, Yannick Renier, François Baldassare, Vincent Collin.

Voilà un film qui enchaîne les clichés comme des perles. En parlant d'un milieu que les auteurs ne connaissent pas. Nous sentons que les auteurs cherchent à dénoncer quelque chose. Mais nous sentons aussi que les auteurs ne connaissent pas ce dont ils parlent. Ce qui a priori n'est pas rédhibitoire. Il n'est pas besoin d'être une poule pour sentir un œuf pourri.

À cette dimension dénuée de tout réalisme s'ajoute un ensemble de personnages qui ne suscitent par d'empathie. À la limite s'ils souffraient plus et mouraient tous ce serait satisfaisant. Nous nous moquons de leurs turpitudes personnelles ou professionnelles, sentimentales ou existentielles. Bien sûr la distribution est impressionnante, entre jeunes acteurs en vogue, vieux acteurs solides ou ringards, la distribution est très solide. Le type casting fonctionne à fond : Jean-Pierre Bacri, est encore sur le même personnage, pénible ; Vincent Lacoste se caricature ; Pascal Greggory se plagie lui-même.

Mais ce film est intéressant sur le plan historique, comme instance d'une idée de cinéma avec des prétentions mais vide de sens car dénué de lien avec la réalité.

Bande-annonce Tout de suite maintenant

mercredi 10 janvier 2024

Tais toi ! (1h25, 2003) de Francis Veber

Avec Gérard Depardieu, Jean Reno,  Richard Berry, André Dussollier,  Jean-Pierre Malo, Jean-Michel Noire, Laurent Gamelon, Aurélien Recoing, Vincent Moscato, Ticky Holgado,  Michel Aumont, Leonor Varela.

La nouvelle vision de film de Francis Veber est très positive. Et beaucoup meux que le souvenir que nous en avions.

Gérard Depardieu est crédible et génial dans ce personnage de Quentin de Montargis, esprit simple qui cherche un ami. Francis Veber refait le scénario de L'emmerdeur (Edouard Molinaro, 1973) qu'il avait écrit. En variant les paramètres. Jean Réno est toujours un tueur, qui cherche à se venger. Gérard Depardieu n'est pas dépressif comme Jacques Brel, mais très con, comme le dit André Dussollier, son psychiatre en prison. Et il s'amourache de Jean Réno, qui va le trainer comme un boulet, mais qui l'aidera finalement à atteindre son but.

Séquences d'anthologie (les rencontres de Gérard Depardieu avec ses codétenus au début du film), rythme, brio de l'interprétation (Gérard Depardieu est génial dans ses interactions avec Jean Réno),  le film est jubilatoire. Mais il s'agit quand même d'une vision de l'humanité assez misanthropique : des tueurs, un simple d'esprit, une migrante, une femme tuée, un alcoolique - Ticky Holgado -, un hôpital psychiatrique avec un psychiatre comme malade - Michel Aumont -. Seuls les flics sont peut-être des humains normaux dans ce film.

Tais-toi

mardi 9 janvier 2024

Les Tuche 2 - Le Rêve Américain (1h34, 2016) de Olivier Baroux

Avec Jean-Paul Rouve, Isabelle Nanty, Claire Nadeau, Sarah Stern, Pierre Lottin, Théo Fernandez, Ken Samuels, Susan Almgren, Richard Robitaille, Christian de la Cortina.

Le crétins sont toujours de la bonne matière pour un film, comique de prime abord. Ici ils sont mis dans un environnement à priori improbable. Les USA avec le midwest, puis la Californie. Le film aborde quelque thèmes à la mode, comme le mariage homosexuel. Et aussi des thèmes universels que la franchise Tuche véhicule : le sentiment et la solidarité familiale, des parents vers les enfants, vers les ainés (avec ici le personnage de la grand-mère) ; il y a aussi l'ouverture d'esprit de la cellule familiale. Le film se permet des pastiches, ici sur la chirurgie esthétique.

Ces Tuche possède donc un capital sympathie. Ils adorent La Petite Maison Dans La Prairie. Ils sont mine de rien ouvert d'esprit. Et le film recèle un certains nombre de perles : les interventions de Claire Nadeau, les dialogues de Pierre Lottin, et bien sûr Jean-Paul Rouve et Isabelle Nanty qui sont à la fête, avec la psychologie particulière du père de famille. Ces Tuche sont une délicieuse antidote à une certaine bien-pensance. 

Il y a aussi leur encontre avec la famille californienne, qui est traitée de manière intéressante, mais qui aurait pu être plus développée ; cela ne peut pas marcher pour le fils car cela viole les règles de la famille Tuche. A noter que le film montre que l'argent à des qualités et peut mettre au pouvoir n'importe qui, et comme si le fait d'avoir de l'argent donnait du talent... Nous laissons à chacun la liberté d'imaginer à qui cela peut s'appliquer.

Il faut reconnaître que le travail d'écriture est important, réussit, que ce soit sur le film dramatique principal, ou au sein de chaque scène. Cinq scénaristes sont crédités : il y a eu un gros travail de conception de chaque séquence pour imaginer ses éléments comiques.

 Les Tuche 2 : Le rêve américain

dimanche 7 janvier 2024

Alad'2 (1h38, 2018) de Lionel Steketee

Avec Kev Adams, Jamel Debbouze, Vanessa Guide, Eric Judor, Ramzy Bedia, Noémie Lenoir, Wahid Bouzidi, Isabelle Nanty, Gérard Depardieu, Jean-Paul Rouve.

Cette suite au film d'Arthur Benzaken (Les nouvelles aventures d'Aladin, 2015) est ratée. Elle manque d'ampleur visuelle. Ici la mise en scène est pensée pour la tablette ou l'ordiphone et pas pour la salle de cinéma. Les plans sont plus rapprochés, les personnages sont moins pensés dans le cadre. Ce film-là fait plus penser à des séquences de spectacles de télévision ou de court métrage pour clip vidéos sur internet.

Le scénario (toujours Daive Cohen crédité) manipule moins de personnages que le premier de série et ne semble construit que comme prétexte à des performances de Jamel Debbouze. Jamel Bebbouze est beaucoup trop présent et son personnage déséquilibre le film : Aladin est devenu un personnage secondaire, voire un figurant. Jamel Debbouze fait son show, très bien, mais ne sert pas le film. D'ailleurs, chaque séquence prise individuellement est sympathique, voire efficace sur le plan comique, mais agrégées elles ne donnent pas à l'ensemble une cohérence de démarche, une sensation de tout. Un exemple : le gag du voyage dans l'espace et le temps où ils croisent Christophe Colomb, est une bonne idée, mais sans intérêt pour l'ensemble du film. Il y a beaucoup de bonnes idées prises individuellement, mais il n'y a pas de direction artistique de l'ensemble.

 Alad'2

samedi 6 janvier 2024

Les Nouvelles Aventures D'Aladin (1h47, 2023) de Arthur Benzaquen

Avec Kev Adams,  Jean-Paul Rouve,  Vanessa Guide, William Lebghil, Audrey Lamy, Arthur Benzaquen, Eric Judor, Michel Blanc, Ramzy Bedia, Nader Boussandel, Fatsah Bouyahmed, Laouni Mouhid.

Arthur Benzaquen et son équipe technique composent un film ample et spectaculaire, où chaque plan recèle une idée saugrenue sans qu'elle perturbe la ligne du scénario. Le film est abondant en personnages, qui sont bien écrits et bien campés. Jean-Paul Rouve, Vanessa Guide, Audrey Lamy, Eric Judor, Michel Blanc, Kev Adams, bref toute la ménagerie est parfaite. Sans oublier Arthur Benzaquen lui-même.

La séquence de la caverne avec les carrelages musicaux est une excellente idée et pastiche avec malice Indiana Jones. Les tapis volants sont parfaits, grâce au numérique. C'est rythmé. C'est spectaculaire. Et c'est amusant. C'est une réussite dans le genre.

Kev Adams est le héros insouciant et vénal. Jean-Paul Rouve en méchant qui sait qu'il est méchant. Vanessa Guide et Audrey Lamy composent des personnages qui apportent malice et rebondissements. L'ensemble de la distribution contribue de manière équilibrée aux pérégrinations d'Adalin Kev Adams, qui n'est pas le personnage le plus intéressant, mais heureusement, tous les autres personnages le sont, avec leurs humours et leur contribution à l'histoire.

 Les Nouvelles Aventures d'Aladin [Blu-Ray]

mercredi 3 janvier 2024

L'humanité (2h21, 1999) de Bruno Dumont

Avec Emmanuel Schotté, Séverine Caneele, Philippe Tullier, Ghislain Ghesquère, Ginette Allègre, Darius, Arnaud Brejon de la Lavergnee, Daniel Petillon.

Que dire de ce chef d’œuvre, de ce monument ? Le meurtre d'une petite fille, un policier, un couple d'amis. Les acteurs sont des non-professionnels, avec leurs manières, leurs lenteurs, leurs hésitations. Et il y a un canevas d'enquête policière très distendue avec en arrière-plan la vie quotidienne de certains individus : l'ouvrière, son amant chauffeur de bus, le policier, la mère du policier, le chef du policier. Mais aussi les décors, les rues, la mer, qui constituent presque des personnages à part entière en étant des constitutifs impératifs de cette enquête. Le film contient beaucoup de paysages, regardés par les protagonistes, et surtout par notre policier enquêteur, amoureux caché de Séverine Caneele. C'est un autre canevas dramatique du film : Emmanuel Schotté est attiré par Séverine Caneele. Et enfin, notre policier est aussi attiré par les odeurs, par le toucher. D'où ces étonnants moments où il caresse ou sent des suspects.

Nous comprenons pourquoi David Cronenberg et son jury ont donné les palmes d'interprétation à Emmanuel Schotté et Séverine Caneele. Ils ont beau être des acteurs amateurs, leur performance est extraordinaire.

Les personnages marchent beaucoup chez Bruno Dumont. Ils marchent beaucoup, et ils attendent beaucoup aussi. Ils font penser à ceux de Takeshi Kitano, qui marchent aussi énormément dans ses films.

Bruno Dumont n'hésite pas à monter des sexes, c'est à dire des scènes de sexe, mais aussi un sexe, celui de son personnage féminin principal, ou de sa doublure doublure, peu importe. Ainsi que celui de la petite fille assassinée. Mais il n'hésite pas à montrer un personnage en suspension, scrutateur de l'horizon (la suspension est une figure qui revient régulièrement dans les films de Bruno Dumont).

Cette humanité, ces humains simples, dont les préoccupations sont peu nombreuses, travailler, se promener, attendre, sont les éléments fondamentaux du cinéma de Bruno Dumont. Il n'est pas besoin ici d'activité extraordinaire, de super-humains, de complots complexes, pour raconter une histoire, qui n'est pas simple elle, mais d'une densité étonnante grâce à ces acteurs.

 L'Humanité [Blu-Ray]