mercredi 27 décembre 2023

Chien De La Casse (1h33, 2023) de Jean-Baptiste Durand

Avec Anthony Bajon, Raphaël Quenard, Galatéa Bellugi, Dominique Reymond, Bernard Blancan, Nathan Le Graciet, Mélanie Martinez, Mike Reilles, Mathieu Amilien, Evelina Pitti.

Voici une belle surprise. Histoire d'amitié entre deux copains d'enfance, qui vivent de petits traffics. L'un est mutique et parle peu (Anthony Bajon), l'autre (Raphaël Quenard) est cultivé, parleur et occupe l'espace, et harcèle son copain d'enfance, qui est consentant. Jean-Baptiste Durand arrive à rendre ces personnages émouvants, en tout cas humains. Il ne les juge pas. Il montre à travers leurs comportement leur mal être plus profond.

Cette petite harmonie de duo de copain va évoluer suite à la rencontre d'une jeune femme dont l'un d'eux tombe amoureux. Et suite aussi à des histoires avec les fournisseurs de drogue.
Ce sont des personnages seuls. Nous les suivont dans leurs routines quotidiennes, entre les habitants du village, la mère de l'un, les copains, les fournisseurs pour le petit traffic qu'ils font.
Cela se déroule au soleil (région du Languedoc) mais se déroule de nuit ou alors la photo assombri par des choix de tons qui n'évoquent pas une région ensoleillée. Car il s'agit d'un drame, dont il est difficile de deviner la progression alors qu'il est facile de deviner les séquences qui suivent.
A noter aussi une bonne utilisation de la musique, peu présente compte tenu du choix de naturalisme, mais qui densifie les images.
Chien de la Casse

mardi 26 décembre 2023

Vers Un Avenir Radieux (Il sol dell'avvenire, 1h35, 2023) de Nanni Moretti

Avec Nanni Moretti, Margherita Buy, Silvio Orlando, Barbora Bobulov, Mathieu Amalric, Jerzy Stuhr, Zsolt Anger, Teco Celio, Francesco Brandi, Valerio Da Silva, Michele Eburnea.

La grande qualité du film est l'enchevêtrement de plusieurs arcs dramatiques : un réalisateur doit gérer son film et ses acteurs, mais aussi sa femme qui est productrice et son couple qui est en question, sa fille, qui présente son amant, le réalisateur du film que sa femme produit, film dans un style très différent du sien. Et enfin il doit gérer ses producteurs, dont le premier est  français, Mathieu Amalric, jusqu'à des coréens, en passant par la séquence hilarante des producteurs de Netflix.

Le réalisateur est bien sûr interprété par Nanni Moretti, de toutes les scènes. Ce qui peut être irritant, mais qui fonctionne car Nanni Moretti parsème son film de dérapages visuels : la balade en trottinette pour les repérages, les chorégraphies de danse où le film bascule subitement en comédie musicale.

Au total le film est un show Moretti autour de ses obsessions, avec le charme de l'imbrication de ces différentes histoires qui gravitent autour de lui. Ses thuriféraires seront en pâmoison, ceux qu'il énervent seront le seront à 100%.
 
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mercredi 20 décembre 2023

Solo (1h23, 1970) de Jean-Pierre Mocky

Avec Jean-Pierre Mocky, Sylvie Bréal, Anne Deleuze, Denis Le Guillou, René-Jean Chauffard, Marcel Pérès, Éric Burnelli, Alain Fourès, Henri Poirier, Christian Duvaleix, Rudy Lenoir, Roger Lumont, Dominique Zardi.

Solo raisonne curieusement contemporain dans sa thématique. La traque de jeunes militants d'extrème gauche qui commettent des attentats contre la bourgeoisie financière et en collectif : ils massacrent littéralement une dizaine de personnes. Le film a été tourné peu de temps après 1968, mais cette thématique est encore vivace. Ils sont traqués par la police, et par Jean-Pierre Mocky lui même, parfait dans le personnage, et avec beaucoup de charisme (il avait proposé le rôle à Jean-Paul Belmondo et Alain Delon, qui ont refusé, il l'a donc fait lui même), qui est le frère de l'un d'eux, mais lui est voleur de bijoux de gens riches, plutôt que de tuer, il vole.

Jean-Pierre Mocky construit une histoire où il se retrouve à aider son jeune frère qui fait partie de ces militants. Le film contient des lignes de dialogues brillantes et qui sonnent très modernes, notamment pour toute les scènes entre Jean-Pierre Mocky et Anne Deleuze seule femme militante du groupe de terroristes.

Comme d'habitude Mocky construit une histoire où tout va très vite, sans plan inutile, sans seconde inutile où de multiples poursuite s’enchevêtrent : Jean-Pierre Mocky essai de retrouver son frère avant la police, Anne Deleuze essai de prévenir le groupe qui essai de se regrouper, pendant que la police progresse et se rapprochent d'eux. Tout ceci est parfaitement entremêlé par les scénaristes Jean-Pierre Mocky et Alain Moury.
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Mad Heidi (1h32, 2022) de Johannes Hartmann et Sandro Klopstein

Avec  Alice Lucy, Max Rüdlinger, Casper Van Dien, David Schofield, Kel Matsena, Almar G. Sato, Pascal Ulli, Kaspar Weiss, Katja Kolm,  Rebecca Dyson-Smith.

Mad Heidi, le film, est un peu dingue. Appréhender un tel film est délicat. Tout est dans l'exagération. Mais les acteurs ne ménagent pas leur peine, pour servir une histoire délirante qui mélange hagiographie fromagère, dictature anti intolérance au lactose, dictature politique, zombies et gore, et éléments sexuels (d'une vulgarité franche).

Revoir Casper Van Dien, dans le rôle d'un dictateur de la Suisse est une bonne idée, et il a l'air de bien s'amuser.

Le rythme est malheureusement un peu mou. Le film est rempli d'idées, mais l'enchaînement est un peu poussif, voire appuyé. Dix minutes de moins, en coupant quelques secondes pour toutes les scènes, auraient bénéficié au film. Le film n'a pas bénéficié par contre de moyens importants, en particulier de tartine de CGI porn, ce qui fait que si l'on regarde dans le coin des images nous percevons cette absence de moyens : derrière la foule nous voyons très vite qu'il y a peu de monde par exemple. Mais c'est aussi ce qui donne son charme à cet exercice.

La déception vient aussi de l'affiche : Heidi devient folle et vengeresse à la fin du film. Nous imaginons qu'il y aura une suite. Mais le film aligne néanmoins depuis le début son lot de délires et ceci de manière continue. Il est clair qu'il y a une croyance de Johannes Hartmann et Sandro Klopstein dans une forme de spectacle où exagérations croisent clins d’œil historiques et films de genre.

Mad Heidi


mardi 19 décembre 2023

L'Homme Qui A Vendu Sa Peau (1h44, 2020) de Kaouther Ben Hana

Avec Yahya Mahayni, Dea Liane, Koen De Bouw, Darina Al Joundi, Monica Bellucci, Christian Vadim, Wim Delvoye, Saad Lostan.

A travers sa conduite, son intrigue et le personnage principal, l'homme qui a vendu sa peau, le film évoque la création artistique et la précarité. Cet homme qui a vendu sa peau est interprété par Yahya Mahayni, qui est tout en subtilité. Nous comprenons ses motivations à travers ses comportements. Mais son personnage garde une part de mystère, ce qui maintient l'empathie et l'intérêt du spectateur. Il y des motivations très élémentaires : sauver sa peau d'immigré, retrouver un amour. Mais le personnages ajoute de petites touches qui font qu'il ne peut être réduit à ces deux motivations.

Le film pose une question intéressante à une époque où les tatouages sont généralisés. Ici, un artiste reconnu (Koen De Bouw, tout en ironie) tatoue le dos d'un immigrés syrien. Le tatouage est un passeport. L'oeuvre est le tatouage mais aussi la peau de l'individu tatoué. Il a un contrat où il doit se présenter à intervalle régulier à des expositions, où il est exposé lui même : il montre son dos. Puis il est vendu. Problématique de marchandisation de l'individu, qui peut être une métaphore pour d'autres problématique de marchandisation des corps. Un film subtile et riche de thèmes multiples.

L'homme qui a vendu sa peau

jeudi 7 décembre 2023

Avatar 2 : La Voie De L'Eau (Avatar : The Way Of Water, 3h12, 2022) de James Cameron

Avec Sam Worthington, Zoe Saldana, Sigourney Weaver,  Stephen Lang, Kate Winslet, Cliff Curtis, Joel David Moore, CCH Pounder, Edie Falco, Brendan Cowell, Jemaine Clement, Jamie Flatters, Britain Dalton,  Trinity Jo-Li Bliss, Jack Champion, Bailey Bass, Filip Geljo, Duane Evans Jr.

James Cameron est il toujours le réalisateur qu'il était? Il adore les dessins-animés. C'est un bel exemple de dessin animé ici. Ce n'est pas notre genre favoris. Il a composé un catalogue de clichés du dessin animé pour la famille, pour petits et grands. Il manque juste deux éléments, qui ne se trouvent pas en général dans les dessins animés pour la famille : la saleté et la sexualité. Le film évoque certains film passés de James Cameron : Abyss bien sûr, Titanic, voire Aliens. Le western est aussi convié avec l'attaque du train. Nous répondons par l'affirmative : c'est un film de James Cameron.

Le film est prévisible par un ensemble de déjà vu, de poncifs, de clichés, tel les perles d'un collier enfilées une à une. Les méchants ne sont pas très méchants. Et ils sont très prévisibles. Le scénario gère par contre parfaitement sa multitude de personnages. Ce n'est pas un film choral, mais c'est tout comme.

Il faut reconnaître que ce dessin animé est un beau livre d'images. Dénué de saletés, de crasse, mais abîmé par les humains. Il faut reconnaître que les images de baleines sont sublimes. Il faut reconnaître que le message écologique est sympathique.

Il est quelque fois difficile de reconnaître un personnage tellement ils se ressemblent, que ce soit pour ceux de la terre ou ceux sur la mer. Cela rend difficile la lisibilité de certaines scènes tellement il y a de personnages. Franchise oblige, James Cameron n'y est pas allé de main morte tellement il y a de personnages. Mais cela ouvre une multitudes de possible pour les suites. En fait il s'agit d'une série-cinéma (pour ne pas dire série télé) qui regroupe ici trois ou quatre épisodes.

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Narappa (2h33, 2021) de Srikanth Addala

Avec  Venkatesh Daggubati, Priyamani, Rajeev Kanakala, Rakhi, Karthik Rathnam, Chaitra, Aadukalam Naren, Deepak Shetty, Shritej, Aravind, Ramaraju, Kadambari Kiran.

Voici un exemplaire du cinéma de Tollywood, film en telugu, dont le centre industriel est Hyderabad dans la région du Telangan.

Narappa est un père de famille qui se bat pour sauver sa terre, sa femme, ses enfants, ses sandales, sa dignité. Il est très résilient, jusqu'à ce que les méchants s'en prennent à ses enfants ou sa femme directement, et là il sort la serpe et se venge. Narappa est interprété par Venkatesh Daggubati, qui joue très bien le chien battu jusqu'à ce qu'il éclate en furie (où il est moins crédible).

Ici les protagonistes vont se battre à coup de haches et de serpes parce qu’un d'eux porte une paire de sandales (et cela ne plait pas aux méchants) ou pour faire justice soit même, car les autorités ne font pas régner la justice. Il y est surtout question de problème territorial : les méchants volent des terres aux pauvres ou sous humains. C'est une société avec des inférieurs, et des nantis défendus par la police. C'est aussi une société moyenâgeuse phallocratique où les femmes sont des objets inférieurs.

C'est un cinéma de narration, mais pas de concision : beaucoup de ralentis, beaucoup de voix off qui surchargent et racontent ce qu'il faut comprendre, beaucoup de dialogues pour que tout le monde comprenne bien. Beaucoup de flashbacks aussi, à vocation explicative encore. Pas de place à la folie ici, mais il faut toujours expliquer par l'injustice.

Narappa

lundi 4 décembre 2023

Decision To Leave (2h19, 2022) de Park Chan-wook

Avec Park Hae-il, Tang Wei, Lee Jung-hyun, Go Kyung-pyo, Shin-Young Kim, Jung Young Sook, Yoo Seung-mok, Teo Yoo, Jeong Min Park, Seo Hyun-woo.

Prix de la mise en scène au Festival de Cannes, mais surtout prix du scénario, car Park Chan-wook et sa scénariste Chung Seo-kyung nous ont concoctés une intrigue complexe, sans être tortueuse, qui se renouvelle régulièrement, sans permettre au spectateur de deviner ce qui va suivre. Jusqu'au final mémorable et d'anthologie, mais surtout d'une tristesse infinie.

L'intrigue est en suspension, portée par nos deux acteurs principaux, Park Hae-il et Tang Wei. Intrigue où un policier enquête sur la mort d'un mari, découvert par sa femme (Tang Wei), deux fois à deux ans d'intervalle : ses maris meurent donc. Le policier retrouve cette même femme pour chacune des enquêtes. Ce n'est pas divulgacher le film que d'indiquer cette information, car le film est dans la relation entre cette femme et le policier, relation directe ou indirecte, lui réalisant son travail en professionnel, elle intrigante ou pas, qui semble avoir des sujets en dehors de ses mariages, mais qui aussi perturbe notre policier.

Park Chan-wook emballe ce scénario avec une esthétique de téléfilm, ce qui rend le film encore plus impressionnant. Le style visuel est assez direct et nous parait peu expérimental. L'éclairage est plutôt fonctionnel visant à une clarté et une visibilité optimales, ce qui est compréhensible compte tenu de la richesse de l'intrigue. Le ratio image est par contre en 2:35.

Enquête policière et histoires d'amour découpées en de multiples scènes ou histoires pour constituer un puzzle qui agrège le tout. Au-delà de la richesse de son scénario, les interprétations toutes en subtilités de Park Hae-il et Tang Wei procurent une densité magnétique au film.

Decision to Leave [Blu-Ray]