vendredi 14 mai 2021

Police Sur La Ville (Madigan, 1h41, 1968) de Don Siegel

Avec Richard Widmark, Henry Fonda, Inger Stevens, Harry Guardino, James Whitmore, Susan Clark, Michael Dunn, Steve Ihnat, Don Stroud, Sheree North, Warren Stevens, Raymond St. Jacques.

Le film surprend par la subtilité des relations entre nos flics (Richard Widmark et Harry Guardino) et leurs femmes. En particulier entre Richard Widmark et sa femme (Inger Stevens, dans le rôle de la femme au foyer parfaite) à la maison, puis à la réception organisée par la police où son mari la lâche (littéralement) ou son amie chanteuse (Sheree North, belle scène, courte, mais qui contribue à rendre le personnage de Richard Widmark sympathique, ou pas). Et aussi entre Henri Fonda et sa maitresse, Susan Clark, qui a de beaux dialogues, qui donnent lieu à la belle scène dans le parc. Et aussi l'unique scène entre son acolyte Harry Guardino et sa femme au téléphone (dont sa relation semble moins conflictuelle que les deux autres).

Il faut dire que leur préoccupation est de retrouver leurs armes de services volées par un psychopathe, très vite, sinon ils seront mis à pied.

La direction d'acteur est subtile et se remarque par le travail avec les seconds rôles: la performance de Don Stroud, personnage d'indicateur surexcité, Susan Clark ou Sheree North, ou le mutisme d'Henry Fonda. Le personnage d'Henry Fonda, droit dans ses bottes dans le rôle du commissaire à la vertu très élevée, mais mutique, qui parle peu. Et qui perd un peu de son aura lorsque l'on comprend que Susan Clark est mariée, et n'est donc pas sa femme.

La musique pêche un peu et parait peu piquante par rapport aux images. C'est le principal défaut du film. Elle date le film dans le début des années soixante (elle n'a pas le côté jazzy qu'apportera Lalo Schiffrin).

La thématique du film est sur le fait que ce que l'on voit cache toujours quelque chose: Henry Fonda, très vertueux, est impliqué dans une relation adultérine; Henri Guardino, le plus violent du duo, semble le mari parfait et prévenant avec sa femme; Richard Widmark, marié et aimant sa femme, file a une liaison épistolaire avec Sheree North et semble avoir deux femmes; Don Stroud en rabatteur de filles excité se révèle un indiceur de qualité; le chef de la police, James Whitmore, est impliqué dans un dessous de table. Le scénario est d'une richesse qui donne une saveur particulière à ce film.

Le format Techniscope est fluide, et Russell Metty donne à ce film policier une patine assez flamboyante. Don Siegel maîtrise son sujet, c'est indéniable. Don Siegel enchainera ensuite son premier, mais pas le dernier film, avec Clint Eastwood avec Un Sherif A New-York (1968).

Police sur la Ville [Blu-Ray]

Les Rôdeurs De La Plaine (Flaming Star, 1h41, 1960) de Don Siegel

Avec Elvis Presley, Barbara Eden,Steve Forrest, Dolores del Rio, John McIntire, Rodolfo Acosta, Karl Swenson, Ford Rainey, Richard Jaeckel, Anne Benton, L.Q. Jones, Douglas Dick, Tom Reese.

Elvis Presley chante juste au début (pendant la séquence d'ouverture), puis il fait l'acteur, plutôt bien, dans le rôle d'un métis, tiraillé entre des Indiens Kiowas qui en ont assez d'être maltraités par les blancs, et sa famille avec sa mère indienne (Dolores Del Rio) et son père blanc (John McIntire). La famille métissée suscite craintes et sollicitations des deux camps (les blancs racistes, les Indiens sur le sentier de la guerre): il leur est demandé de choisir un camp, ou alors ce qui arrive (une famille de fermiers blancs est massacrée par le nouveau chef des Kiowas) est de leur faute. Le film montre bien les problèmes de cohabitation et racisme.

Le scénario fait monter progressivement la tension et utilise les tiraillements possibles ce qui conduit Elvis Presley à choisir son camp et à mal finir (il est clair qu'il était difficile de faire chanter Elvis Presley pendant le film compte tenu du sujet). Ses motivations et son changement subit de camp sont assez rapides et moyennement préparés par le scénario, mais il est vrai que sa situation est difficilement tenable.

Sur le plan technique, le CinemaScope est superbe: Don Siegel sait l'utiliser tout à la fois dans sa largeur, mais aussi sur la profondeur de champ. Les acteurs sont tous bons, et la direction d'acteur est subtile avec des acteurs comme Steve Forrest dans le rôle du frère (bien blanc lui), Dolores Del Rio dans le rôle de la mère indienne, John McIntire dans le rôle du père de famille, tous très bons.

Les Rôdeurs de la Plaine [Édition Spéciale Combo Blu-Ray + DVD]

Boss Level (1h34, 2021) de Joe Carnahan

Avec Frank Grillo, Mel Gibson, Naomi Watts, Will Sasso, Annabelle Wallis, Sheaun McKinney, Selina Lo, Michelle Yeoh, Ken Jeong, Meadow Williams.

Joe Carnahan reprend le méta scénario d'Un Jour Sans Fin (1993) ou d'Edge Of Tomorrow (2014), pour y intégrer la culture des jeux vidéo, la fin du monde, des séquences d'actions très violentes ou amusantes (des fois les deux en même temps), des bribes de relation père fils, et un couple en dissolution (quelque plans avec Naomi Watts, trop rare, avec une interprétation à fleur de peau).

L'évènement qui se répète est la mort de Frank Grillo, qui est pourchassé par une dizaine de tueurs (avec différents types d'armes: sabre, mitrailleuse, couteau, explosif, etc.). Chaque fois qu'il meurt, il se  réveille  dans un lit avec la horde de tueurs qui le poursuit à nouveau.

Au global le film parait inachevé: sa structure narrative et le scénario, basés sur un prétexte, peinent à conclure l'histoire. Cela résulte en un ensemble de séquences spectaculaires et autonomes pour la dose d'action quelles véhiculent, ainsi que l'humour. Mais cela n'aboutit pas à un ensemble cohérent qui clôt l'histoire ou l'ouvre vers d'autres portes (la fin du monde est évoquée par exemple).
Frank Grillo, acteur nous étant inconnu, se révèle un parfait vecteur pour l'action, la comédie et le drame de son personnage.
Mel Gibson fait une apparition ridicule en méchant qui fume le cigare.
Au total c'est une semi-déception pour ce Joe Carnahan: peut mieux faire.
Boss Level [Blu-Ray]

Le Messager De La Mort (Messenger Of Death, 1h31, 1988) de Jack Lee Thompson

Avec  Charles Bronson, Trish Van Devere, Laurence Luckinbill, Daniel Benzali, Marilyn Hassett, Charles Dierkop, Jeff Corey, John Ireland, Penny Peyser, Gene Davis, John Solari, Jon Cedar, Tom Everett, Duncan Gamble, Bert Williams, Jerome Thor.

Un film où Charles Bronson ne tue personne. Malgré le titre. Malgré l'affiche ou la jaquette du vidéogramme. Il y a bien des morts, au sein d'une famille de mormons, où enfants et femmes sont massacrés (c'est le début du film). Charles Bronson est un journaliste qui enquête pour comprendre pourquoi une famille de mormons a été décimée. Il mène l'enquête de son côté, à son rythme, indépendamment de la police, appuyé par son journal qui veut de la sensation.
Le côté documentaire du film nous présente les schémas de pensée de ces mormons, où volontés de Dieu (qui explique tout) et vengeances font bon ménage, dans un pays où les armes sont en vente libre. Le messager de la mort est le tueur qui a décimé la famille, sans rapport avec le personnage de Charles Bronson qui fait son enquête. Ou alors, le journaliste à travers son enquête, qui va provoquer indirectement des représailles entre familles mormones.
Un autre élément intéressant du film est l'ensemble des décors naturels du Colorado. Ajoutons une musique superbe qui peut faire penser à un film d'horreur: le compositeur, Robert O. Ragland nous est inconnu, mais a signé beaucoup de musiques de film. Celle-ci est intéressante, car elle convient au suspense et à l'horreur.
Le film se terminant avec de méchants capitalistes et politiques avides d'argent. 
Le film se laisse donc visionner sans problème. Les scènes à la ville (Denver, les capitalistes, les personnes importantes) étant le parfait contrepoint des scènes à la campagne où Charles Bronson enquête et finit par reconstituer les pièces du puzzle dans les fermes des mormons.
Le Messager de la Mort [Blu-Ray]

mercredi 12 mai 2021

Payback (1999, 1h40) de Brian Helgeland

Avec Mel Gibson, Gregg Henry, Maria Bello, David Paymer, Bill Duke, Deborah Kara Unger, John Glover, William Devane, Lucy Liu, Kris Kristofferson, Jack Conley.

Un chef-d’œuvre instantané de polar Noir, d'ailleurs très bleu (photographie), avec deux femmes fatales, avec une musique de polar urbain des années soixante-dix, avec de l'humour et de la violence. La progression de l'histoire est jubilatoire, car personne ne comprend que Porter, Mel Gibson, fait tout cela pour 70000 dollars: affronter le syndicat du crime jusqu'à ses dirigeants les plus élevés dans la hiérarchie.

Les ingrédients sont divers et standards dans le genre: la fatalité, les trahisons multiples, le flashback du casse, la voix off de Mel Gibson qui fait merveille, la femme fatale (Maria Bello), les hommes faibles. Cet ensemble est augmenté avec une violence graphique nécessaire à l'univers décrit. Le bréviaire est parfait. Le suspense va crescendo avec régulièrement une nouvelle partie prenante qui veut voler son argent à Porter: le collègue qui le trahit (Greg Henry dans un numéro de pervers d'anthologie), le dealer, les deux flics, les trois niveaux de chefs des mafieux: William Devane, Kris Kristofferson, James Coburn.

La superbe photographie, toute en contrastes et en tons bleus produit des textures charnues, épaisses. La direction d'acteur est phénoménale. La musique fleure bon le polar urbain des années soixante-dix.

Un bijou dans son genre.

Payback Poster

L.627 (2h25, 1992) de Bertrand Tavernier

Avec Didier Bezace, Jean-Paul Comart, Charlotte Kady, Jean-Roger Milo, Nils Tavernier, Philippe Torreton, Lara Guirao, Cécile Garcia-Fogel, Claude Brosset, Fabrice Roux, Jean-Luc Abel.

Superbes brochettes de personnages qui évoluent dans la police française (brigade des stupéfiants, puis vie dans un commissariat, puis retour à la brigade des stupéfiants) des années quatre-vingt-dix où les manques de moyens sont patents, où faire son travail parait ubuesque.

Une histoire pleine de vies, de drames, de duretés, conduites par Didier Bezace, policier au réseau d'indicateurs très développé qui ne peut pas faire son job sans ses informateurs. La frontière entre les policiers et ce qui est hors la loi est parfois très mince. Bertrand Tavernier montre tout à la fois l'humanité des policiers, l'humanité de leurs clients, et de leurs indicateurs. Il pointe l'absurdité d'un système qui manque de moyens et l'absence d'objectifs des équipes (ou alors des objectifs ridicules).

La distribution est formidable. Les personnages sont bien écrits: le scénario arrive à leur donner de la substance et à les caractériser très vite. Le film est passionnant par son équilibre permanent entre réalisme, drame et humour. Un chef d'oeuvre.

 L.627 Poster

Le Flic Se Rebiffe (The Midnight Man, 1h57, 1974) de Roland Kibbee et Burt Lancaster

Avec Burt Lancaster, Susan Clark, Cameron Mitchell, Morgan Woodward, Harris Yulin, Robert Quarry, Joan Lorring, Lawrence Dobkin, Ed Lauter, Mills Watson, Charles Tyner, Catherine Bach.

Burt Lancaster campe un policier à la retraite qui sort de prison, qui pour gagner sa vie prend le job de gardien de nuit dans l'équipe de nuit d'une faculté, introduit par un copain flic qui lui aussi s'est converti. Il prend son travail très au sérieux. Ainsi que ses visites à son agent de probation, Susan Clark, qui ne lui est pas indifférente, et réciproquement. Mais un meurtre survient sur le campus et il se retrouve à mener sa propre enquête. L'histoire faisant se croiser les politiques locaux, la police locale qui mène aussi son enquête et qui ne veut pas de ce flic à la retraite, ses collègues, et les jeunes étudiants, hippies ou pas, et son officier de probation qui va se retrouvée mêlée à tout cela.

Le film contient peu de séquences d'action et construit sa narration sur de multiples personnages. Le film policier au ton très années soixante-dix fonctionne parfaitement bien : bon scénario qui mélange tous ses personnages qui se révèlent ne pas être ceux que l'on imagine, littéralement, où seul Burt Lancaster se révèle être un personnage positif et fiable. Tous les autres se révèlent avoir un double jeu, calculateurs et ayant un autre agenda que ce qui nous est montré.
Le film reste intéressant et possède sa propre tonalité malgré ses quarante-cinq ans.
 
Le Flic se rebiffe [Blu-ray]

Adieu Les Cons (1h27, 2020) de Albert Dupontel

Avec Virginie Efira, Albert Dupontel, Nicolas Marié, Jackie Berroyer, Philippe Uchan, Michel Vuillermoz, Laurent Stocker, Kyan Khojandi, Grégoire Ludig, Bouli Lanners, David Marsais.

Le système Albert Dupontel commence à tourner en rond, tel un vieillard cacochyme dont le prêchi-prêcha a besoin d'être révisé. Son bric-à-brac, sa direction d'acteur manquant de subtilité, ses choix techniques (photo, focale, cadrage, angle) semblent maintenant des tics que l'on remarque. Malgré ses 87 minutes, le film parait long. Le brio technique est une chose, mais il doit servir une substance, ici absente, ou trop mécanique. Le film possède peu d'hystérésis et s'oublie relativement vite. 

Même Virginie Efira parait d'habitude plus douée. Et l'acteur Albert Dupontel ne parait pas dirigé (un air ahuri en permanence avec des dialogues redondants - résultant probablement d'un manque de confiance du réalisateur dans sa mise en scène -).
Albert Dupontel devrait continuer sa veine où il met en scène une histoire dont il n'est pas à l'origine, comme le superbe Au Revoir Là Haut (2017), où son savoir-faire servait l'histoire et le film.
Science sans substance n'est qu'ennui du spectateur.
Bande-annonce Adieu Les Cons

mardi 11 mai 2021

Buffet Froid (1979, 1h29) de Bertrand Blier

Avec Gérard Depardieu, Bernard Blier, Jean Carmet, Geneviève Page, Denise Gence, Marco Perrin, Jean Benguigui, Carole Bouquet, Jean Rougerie, Liliane Rovère, Bernard Crombey, 

Le principe du film est de prendre des situations banales, de la vie courante, de la vie de tous les jours, et de les tordre avec des éléments d'absurdité et des mises en abyme. Avec en arrière-plan le parcours d'un tueur.

Le film repose beaucoup sur les décors: le quartier de La Défense et ses tours, la nuit, les esplanades vides, les tours d'appartements vides, le terrain vague la nuit, la gare souterraine, le parking souterrain, les couloirs déserts, la verdure à la fin, le lac et les rochers. Tous étant déserts et vide. Y compris les appartements: celui de Gérard Depardieu qui n'a pas grand-chose d'humain, ou celui de Bernard Blier avec ses cartons non déballés. L'ensemble des décors du quartier de La Défense, couloirs, esplanades, quais, escaliers, halls, sont vides.  Ils accentuent le côté irréel du film, presque fantastique.

Le film est dur avec les femmes: il dénonce la misogynie et montre comment les femmes sont transformées en objet. Très beau personnage tragique de Geneviève Page.

Belle scène d'ouverture avec Michel Serrault sur le quai du RER à la station de La Défense.

Au total, symphonie pour mettre en abime les habitats industriels et dénoncer leur absence d'humanisme, le film reste étonnant et unique en son genre.

Buffet Froid

Piège De Cristal (Die Hard, 2h12, 1988) de John McTiernan

Avec Bruce Willis, Bonnie Bedelia, Reginald VelJohnson, Paul Gleason, De'voreaux White, William Atherton, Hart Bochner, James Shigeta, Alan Rickman, Alexander Godunov, Bruno Doyon, Andreas Wisniewski, Robert Davi, Clarence Gilyard Jr., Joey Plewa, Lorenzo Caccialanza,

Piège de Cristal se situe après Predator (1987) et avant A La Poursuite d'Octobre Rouge (1990), soit trois chefs d'oeuvres et trois succès commerciaux pour John McTiernan.

Avec comme vedette du film la tour dans laquelle l'ensemble se déroule.

Revoir John McTiernan s'est se dire que la mise en scène est d'une élégance folle, le scénario est parfait (Jeb Stuart et Steven E. de Souza sont passés dessus), avec un méchant de grande qualité.

Les séquences d'anthologie sont enfilées comme des perles. L'attrait du scénario est de mettre en scène des gens ordinaires comme Bruce Willis en flic de New York, mais bien loin du policier qui tire puis réfléchi, mais aussi le flic pote avec qui il parle (Reginald Veljohnson). Ceux-ci sont confrontés à des cambrioleurs, très équipés, très professionnels. Avec Alan Rickman en tête de pont du groupe de méchants cambrioleurs (des Européens, Asiatiques, noirs, latinos). Avec aussi les éléments d'humour avec le duo comique, les Johnson et Johnson du F.B.I.

Ce policier ordinaire possède des caractéristiques qui le rendent attachant très vite, comme ses soucis avec sa femme ou comme le fait qu'il n'est pas indestructible et qu'il souffre à intervalle régulier: il a des blessures qui ne le rendent pas immortel ou insensible aux balles. Il chute, il se coupe, il a faim, il a peur en avion. Différents éléments le rendent attachant au spectateur, ce qui permet une forte identification. Les films d'action de John McTiernan essaient toujours de montrer l'action sous un angle différent, de manière inhabituelle, de sortir des clichés consubstantiels au genre "action". C'est ici une totale réussite.

Piège de cristal Poster

New-York 1997 (Escape from New York, 1981, 1h39) de John Carpenter

Avec  Kurt Russell, Lee Van Cleef,  Ernest Borgnine,Donald Pleasence, Isaac Hayes, Season Hubley, Harry Dean Stanton, Adrienne Barbeau, Tom Atkins.

Le film matrice de John Carpenter où son sens de la série B est au summum. La promiscuité du budget fournit une patine riche avec des décors souvent dans l'ombre. La décoration est justement inventive, très accessoirisée, avec un superbe travail de Joe Alves. Ajoutons le travail photographique de Dean Cundey: beaucoup de noirs, de plans dans la pénombre, le film se déroulant lors d'une nuit. Que la dystopie est belle...

Avec une musique au diapason de la narration par John Carpenter et Alan  Howarth. La musique est à la  fois simple et simpliste, du plus bel effet et colore instantanément chaque plan: en la rythmant, en faisant montée la tension ou en jouant la surprise lorsqu'il le faut.

Du côté des effets visuels et effets spéciaux, le film garde son charme et tient toujours la route du spectaculaire (comme déjà évoqué, gros travail du département décoration).

Le film garde un ton sec et contient de belles bascules nerveuses dans le drame: les choses sont calmes, un détail annonciateur, et subitement tout bascule. Le film est une montagne russe. Le film contient de belles scènes-chocs. Une superbe en exemple: l'aspiration de Season Hubley par le sol avec avant quelques dialogues d'apaisement après une tension progressive qui monte (les habitants des égouts qui sortent en surface).

New York 1997

Les Morfalous (1984, 1h46) de Henri Verneuil

Avec Jean-Paul Belmondo, Jacques Villeret, Michel Constantin, Michel Creton, Matthias Habich, François Perrot, Marie Laforêt.

Ici nous changeons de metteur en scène (ce n'est pas Georges Lautner), c'est-à-dire de gestionnaire de plateau, avec Henri Verneuil. Dont la qualité des films dépend du sujet et de la qualité des scénarios, le metteur en scène n'étant pas capable de transcender sa matière.

Les sketches du clown Jean-Paul Belmondo sont présents. Il est épaulé ici par des acteurs confirmés, avec Michel Constantin, le personnage le plus sympathique et intéressant du film, Jacques Villeret, en mode mineur, Michel Creton, en mode "je passais par là pour voir mon pote le clown": son personnage ne sert strictement à rien.

Les déclamations de dialogues de Jean-Paul Belmondo sont parfois ridicules, et certains dialogues sont d'une nullité abyssale. Le scénario enchaine un nombre de clichés impressionnants. Le montage est paresseux (ces plans alternés entre Belmondo et les plans du char roulant à la fin sont interminables). Le film est particulièrement misogyne avec chacun des personnages féminins.

Est-il possible de tout rater avec autant de moyens? Un film de paresseux.

Les Morfalous

 

Les 3 Frères (1995, 1h45) de Didier Bourdon et Bernard Campan

Avec  Didier Bourdon, Bernard Campan, Pascal Légitimus, Antoine du Merle, Anne Jacquemin, Marine Jolivet, Annick Alane, Pierre Meyrand, Isabelle Gruault, Bernard Farcy, Elie Semoun.

Ces trois frères contient de bons éléments, mais s'essouffle dans son dernier tiers. Le personnage le mieux croqué est Pascal Legitimus et sa société avec Bernard Farcy en Steven. Chacun des trois personnages interprétés par nos Inconnus incarne de manière exagérée des personnages clés de leur époque, bien croqués dans la première moitié du film.

Le film commence bien avec les trois frères qui se rencontrent, qui doivent cohabiter alors qu'ils sont socialement et sociétalement dans des univers différents. Certains gags fonctionnent, mais le film s’essouffle sur la durée et les trois scénaristes rament dur pour terminer et clôturer leur histoire: la fin n'a aucune hystérésis. La moitié du film manque cruellement de rythme. Le point de vue d'un tiers a manqué pour compléter le scénario et le sortir de son état d’embryon.

Les trois frères Poster

Flic Ou Voyou (1979, 1h47) de Georges Lautner

Avec Jean-Paul Belmondo, Georges Géret, Jean-François Balmer, Claude Brosset, Julie Jézéquel, Michel Beaune, Tony Kendall, Catherine Lachens, Juliette Mills, Venantino Venantini, Charles Gérard, Michel Galabru, Marie Laforêt, Philippe Castelli

Le film est une succession de sketches du comique Jean-Paul Belmondo. Les sketches de Jean-Paul Belmondo, s'appuyant sur des dialogues ridicules, font vraiment pause plastique en mode stand-up, avec aucun point de vue du metteur en scène.
Quel a été le travail de Georges Lautner? Un gestionnaire de plateau? Un gestionnaire des copains de Jean-Paul Belmondo? Le gestionnaire de Jean-Paul Belmondo, star nationale qui surement devait faire comme il voulait. La star était au fait de sa popularité et devait surement être difficile à diriger.

Le film est intéressant à étudier comme objet où il y a visiblement un manque de discernement de ses créateurs à tous les niveaux. Le film contient des moments qui se veulent comiques, mais qui sont consternants, par exemple la séquence de l'auto-école avec Philippe Castelli. Celle-ci étant inutile sur le plan de la narration et n'étant qu'un gag. Les dialogues sont souvent ineptes. Le scénario est confus et finalement c'est ce qu'il y a de plus intéressant, car cette confusion fournit un peu de mystère, et amène le spectateur à se poser la question de où ceci va l'emmener.
Le cadrage et la photographie sont celles d'un téléfilm: Derrick semble être la référence (281 épisodes de 60 minutes pendant 24 ans, c'est une référence...).

Cela se veut un film comique et un film policier, il semble l’être effectivement, un peu des deux. Le mélange des genres est toujours casse-gueule.

Flic ou voyou

La Brigade Héroïque (Saskatchewan, 1954, 1h27) de Raoul Walsh

Avec Alan Ladd, Alan Ladd, J. Carrol Naish, Hugh O'Brian, Robert Douglas, George J. Lewis, Richard Long, Jay Silverheels, Antonio Moreno, Frank Chase, Lowell Gilmore, Anthony Caruso.

Le film est très agréable sur une histoire et un canevas maintes fois vu dans le western. Des blancs (ici des Tuniques Rouges car nous sommes au Canada), militaires obtus avec épis de maïs dans le derrière, cohabitant avec des métis où un blanc élevé par les Indiens (Alan Ladd, faiblement crédible, mais il assure le job correctement même s'il est un peu lisse), doivent gérer des Indiens pacifiques (les Cree) sur le point d'entrée en guerre sous l'appel d'Indiens belligérants (les Sioux).  Le tout dans un ensemble de décors naturels superbes de la région du Saskatchewan (le titre original).

Il  faut reconnaitre que le love interest, Shelley Winters, n'est pas Virginya Mayo, et suscite peu d'empathie.Et la tartine de musique est par moment pénible, mais c'était un standard à l'époque.

Le scénario est suffisamment varié et riche. Les décors superbes du Canada, et l'utilisation d'un lac plutôt inhabituelle dans le genre (poursuite en canoés) produisent un beau spectacle pour les yeux. Ce qui donne au total un western classique qui remplit son cahier des charges.

La Brigade héroïque [Édition Spéciale Combo Blu-Ray + DVD]

Un Condé (1970, 1h35) de Yves Boisset

Avec Michel Bouquet, Françoise Fabian, Gianni Garko, Michel Constantin, Anne Carrère, Rufus, Théo Sarapo, Henri Garcin, Pierre Massimi, Bernard Fresson, Adolfo Celi, Jean-Claude Bercq, Marcel Gassouk.

Excellent film policier, polar, avec un Michel Bouquet obsessionnel à retrouver et tuer le tueur de son ami, flic idéaliste (Bernard Fresson) et donc naïf. Pour y arriver, il est prêt à tout, mensonge, meurtre, torture, passage à tabac. Tout y passe dans ce film où les bandits sont pourris, où les flics sont pourris, où les honnêtes gens sont pourris (ceux qui ne sont pas flics ou bandits).

Le film contient son lot de meurtres pour égrener l'enquête suicidaire que mène Michel Bouquet. Le film contient son lot de scènes d'anthologie: l'affrontement avec Beausourire et Lupo, puis la scène du pistolet avec Lupo. Ainsi que la rencontre avec Michel Constantin, ou les scènes avec Adolfo Celi, parfait en commissaire principal politique, obséquieux et torve.

La musique du film, assez déstructurée est peu utilisée et à bon escient: elle contribue au climat du film, où beaucoup de lieux visités paraissent déserts (hormis le commissariat). Ce qui donne aussi au film un ton, pas irréel, mais en suspension, un peu abstrait, du plus bel effet.

Un Conde [Blu-Ray]

lundi 10 mai 2021

La 7ème Cible (1984, 1h48) de Claude Pinoteau

Avec Lino Ventura, Lea Massari, Jean Poiret, Roger Planchon, Elizabeth Bourgine, Béatrice Agenin, Jean-Pierre Bacri, Robert Hoffmann.

Le film possède un ton de suspense neurasthénique très agréable. Lino Ventura est victime d’agressions plus ou moins graves: coup de téléphones anonymes, voiture percutée, tabassage. Ce qui fournit une incertitude dans la narration et laisse la possibilité de faire évoluer le sujet: est-ce politique, personnel, criminel? Et puis le scénario oriente le spectateur vers une piste et permet de traiter les origines du problème dans le dernier tiers.

Les personnages de la police sont bien écrit, avec leur dubitativité et ironie: est une bonne idée et rajoute de l'incertitude, car Lino Ventura ne peut pas trouver d'aide auprès de la police. Avec un Jean-Pierre Bacri subtil et amusant à la fois.

Les personnages de Jean Poiret et Léa Massari, couple d'amis avec des fêlures permettent d'enrichir la narration d'à-côtés sans rapport avec l'intrigue principale en donnant de la densité au personnage de Lino Ventura, ancien amant de Léa Massari, ami de Jean Poiret.

Au total le film constitue un bon film à suspense. Sans la dimension technologique qu'aurait le film de nos jours ni la dimension film d'action qui serait hypertrophiée (le film conte quelques cascades en voitures néanmoins pour assurer le minimum syndical du polar des années quatre-vingt).

La 7ème cible [Blu-ray]

I Care A Lot (2020, 1h58) de J Blakeson

Avec Rosamund Pike, Peter Dinklage, Eiza González, Dianne Wiest, Chris Messina, Isiah Whitlock Jr., Macon Blair, Alicia Witt, Damian Young.

Voici un film qui est basé sur une fausse bonne idée. Une tutrice arnaque des personnes âgées en les enfermant en maison de retraite ou hôpital psychiatrique pour voler leurs biens. Rosamund Pike l'interprète avec jubilation et avec monotonie (ses expressions faciles sont peu variées). Manque de chance pour elle et heureusement pour la dramaturgie, une de ces vieilles dames va se révéler être la maman d'un mafieux russe, qui bien sûr n'est pas content. Mais heureusement pour elle, ces mafieux vont se révéler être des amateurs, des crétins finis qui ne savent pas faire leur travail, très faiblement intelligent pour ne pas dire stupides, et vont se retrouver roulés dans la farine.

Donc ce film policier, qui peut être vu comme une comédie avec humour noir assume jusqu'au bout son parti pris et fait une star de Rosamund Pike qui devient une capitaliste de référence. Le film contient deux épilogues: le premier très capitaliste et dans l'esprit du film où tous les personnages sont mauvais; le deuxième où un enfant d'une des victimes de Rosamund Pike se vengera. Nous sommes d'ailleurs étonnés que cela n'arrivât pas plus tôt.

Dans l'ensemble le film est techniquement parfait, un peu trop long (deux heures quand même) dans un genre très casse-gueule qu'est celui de la comédie noire. Le film manque peut-être de subversion et de jusqu’au-boutisme dans la noirceur.

I Care a Lot Poster

L'Emprise Des Ténèbres (The Serpent And The Rainbow, 1988, 1h38) de Wes Craven

Avec  Bill Pullman, Cathy Tyson, Zakes Mokae, Paul Winfield, Brent Jennings, Conrad Roberts, Badja Djola, Theresa Merritt, Michael Gough, Paul Guilfoyle.

Wes Craven, maître du film d'horreur, a en permanence cherché à créer des nouveautés, à inventer, à renouveler le genre, voire le pérenniser. Quelquefois avec réussite commerciale, quelquefois avec réussite artistique, quelquefois les deux. L'Emprise Des Ténèbres rentre dans la catégorie réussite artistique, grâce à son sujet et à son traitement. Le film reste impressionnant et étonnant. Nous ne savons pas quels sont les éléments documentaires et proches du folklore de Haïti, mais le film  et le scénario de Richard Maxwell et Adam Rodman sont très riches. Le film mélange hallucinations, cauchemars, contexte politique de Haïti, zombification, tortures. Un bréviaire de l'horreur, en suggérant beaucoup et en montrant lorsqu'il le faut.

La ligne principale du film envoie ce pauvre Bill Pullman qui travaille pour une firme pharmaceutique rechercher la substance qui transforme les morts en zombis dans un but d'exploitation mercantile. Il va vivre une descente aux enfers, sans rien maîtriser, et s'en sortira un peu par hasard.

Le film gère une tension permanente, avec de multiples séquences-chocs qui avancent crescendo en intensité tout au long du film. Les personnages et acteurs sont impressionnants: Zakes Mokae, Paul Winfield et Brent Jennings. Accompagnés par Cathy Tyson pour la contribution locale romantique qui ne fait pas peur.

Sinon le film n'est pas une publicité pour Haïti, loin de là, avec toutes les choses horribles qui sont montrées.

L'emprise des tenebres

Mira La Fille Du Train (The Girl on the Train, 2021, 2h) de Ribhu Dasgupta

Avec Parineeti Chopra, Aditi Rao Hydari, Kirti Kulhari, Hiten Patel, Natasha Benton, Avinash Tiwary, Nisha Aaliya.

Le patron est le whodunit. Parineeti Chopra est embarquée dans une histoire où elle suit une jeune femme qui est tuée, jeune femme qu'elle observait depuis son train lorsqu'elle était sur son balcon lors de ses voyages quotidiens. Elle va essayer de comprendre ce qui s'est passé.

Sa propre histoire est compliquée, mariage, trahison, accident alors qu'elle est enceinte, perte de l'enfant, divorce, ce qui provoque chez elle alcoolisme et état toujours à la limite de l'hystérie ou de la dépression.

Cet ensemble, non dénué de suspense, bénéficie d'une mise en scène plate, sans point de vue, et non contributive à la narration. Comme le font beaucoup d'illustrateurs de scénario. Le travail n'a pas été facile pour les quatre scénaristes/dialoguistes crédités, l'articulation entre les deux histoires est plutôt réussie et aucun détail n'est le fruit du hasard. Sur la durée le film est un peu long et pourrait être raccourci de vingt minutes.

En bon film indien, il y a trois séquences chantées, qui font une synthèse sur l'état d'esprit de Parineeti Chopra tout en chantant et avec chorégraphie.

Mira, la fille du train Poster

Je Veux Juste En Finir (I'm Thinking of Ending Things, 2h14, 2020) de Charlie Kaufman

Avec Jesse Plemons, Jessie Buckley, Toni Collette, David Thewlis.

Voici un film à l'atmosphère envoutante et perturbante. Par son montage qui alterne l'histoire de Jesse Plemons qui emmène en voiture lors d'un week-end de tempête de neige sa fiancée chez ses parents, avec des plans de flashback et d'autres qui resteront mystèrieux jusqu'à la fin. 

Les parents s'avèrent, très particuliers, le film et l'écriture faisant un gros travail sur eux, à la fois dans leur comportement entre eux, envers leur fils et envers sa fiancée. Le fils, Jesse Plemons, est un intellectuel, sa fiancée aussi, mais ses parents sont à la foi simple, arriérés, dévergondés, et assez indescriptibles, et nous sont montrés à différents âges.

Le film, à partir d'un travail phénoménal sur les décors (Molly Hugues, Mattie Siegal), sur la direction artistique (Merissa Lombardo), sur les maquillages (les différents stades de vie des Toni Collette et David Thewlis), distille une empreinte visuelle importante. Que ce soit dans la maison, dans la voiture, les paysages enneigés ou à l'intérieur de l'école à la fin.

L'ensemble produit une œuvre avec une tension progressive, qui avance par petites touches, toujours présentes, sans exploser, mais qui attire l'attention du spectateur, pour donner un fantastique très léger, par effleurement. L'absence de musique permet de maintenir l'hypnotisme du film, de densifier les images et les dialogues énoncés par les personnages.

Bien que le film soit très riche en dialogue, beaucoup d'informations sont transmises par la mise en scène, le décor, le montage.

Il est probable que de tels matériaux seraient aussi une bonne base pour une mise en scène au théâtre.
Beau travail.

Je veux juste en finir Poster